Unpointcinq et Tabloïd s’unissent pour vous présenter des Québécoises et des Québécois qui placent l’action climatique au cœur de leurs initiatives.
Une entreprise montréalaise a inventé une technique qui permet de recycler 95 % des batteries des voitures électriques, réduisant ainsi l’impact de ces véhicules sur le climat.
Recyclage Lithion, une société qui possède une usine-pilote dans le quartier Anjou, vient d’obtenir un brevet pour son procédé novateur, nommé hydrométallurgie, qui permet de recycler quasiment toutes les parties des batteries pour les réutiliser dans la fabrication de nouvelles, tout aussi performantes.
Jusqu’à cette invention, les batteries au lithium-ion des voitures électriques étaient recyclées à l’aide d’une technique appelée pyrométallurgie, qui repose sur la combustion pour séparer les métaux et les minerais. En plus d’être polluant, ce procédé ne permet de recueillir que de 50 à 70 % des précieux composants d’une batterie : on y perd notamment le graphite et le lithium.
On prend un gâteau, on le défait, puis on redonne au pâtissier du sucre, de la vanille, de la farine, du lait et des œufs afin qu’il refasse une recette à son goût.
Grâce à l’hydrométallurgie, une méthode utilisée par l’industrie minière consistant à filtrer, à dissoudre et à purifier la matière à l’aide d’acides et de solvants réutilisables, Recyclage Lithion est en mesure de recycler les batteries pratiquement à l’infini. La nouvelle technique permet donc d’alléger grandement l’impact de ces véhicules sur le climat, au moment même où l’électrification des transports est mise de l’avant par le gouvernement du Québec dans son Plan pour une économie verte.
« Ce brevet, c’est une belle confirmation de tout le travail qu’on a accompli dans les dernières années », signale le coordonnateur au développement des affaires de Recyclage Lithion, Jean-Christophe Lambert.
Réduire les GES dès la construction
Les voitures électriques ne brûlent pas d’essence, mais plus de gaz à effet de serre (GES) est généré lors de leur construction que celle des voitures qui en brûlent.
La fabrication d’une voiture à essence standard génère en effet quelque 10 tonnes de GES, contre 14 tonnes pour une voiture électrique. Le tiers de ces émissions sont attribuables à la batterie : l’extraction minière des métaux et des minerais qui la composent exige en effet d’énormes quantités d’énergie et d’eau, en plus de dégrader les écosystèmes et de contribuer à l’épuisement des ressources.
Le procédé de Recyclage Lithion permettra de diminuer « facilement 80 % des émissions de gaz à effet de serre dégagées par la production des batteries », estime le président de l’Association des véhicules électriques du Québec, Simon-Pierre Rioux. « C’est primordial afin que le véhicule électrique ait du succès », ajoute-t-il.
La production d’une voiture électrique est responsable d’environ 90 % des GES émis durant son cycle de vie au Québec, contre environ 15 % pour une voiture à essence.
Source: Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services.
Une envolée électrisante
Le brevet obtenu par Recyclage Lithion lui permet de se tailler une place dans un marché porteur, qui est estimé à 600 M$ en Amérique du Nord cette année et qui devrait atteindre les 6 G$ en 2030.
Après une phase de démarrage au premier semestre de 2020, l’usine-pilote de l’entreprise est désormais opérationnelle. D’ici 2023, elle pourra traiter 200 tonnes de batteries par an, soit l’équivalent de 300 à 650 batteries de voitures électriques.
De quoi bien se préparer à accueillir les premières voitures électriques qui vont bientôt finir à la casse, et au boom d’achats de voitures électriques lié à l’annonce du gouvernement Legault de l’interdiction des ventes de véhicules neufs à essence à partir de 2035.
« Puisqu’on est les joueurs les plus avancés en Amérique du Nord dans ce secteur-là, on pense desservir aussi l’Ontario et une partie du nord-est des États-Unis », affirme M. Lambert.
À plus long terme, Recyclage Lithion veut déployer ses ailes à l’échelle mondiale en créant des usines à proximité des métropoles. « Transporter des batteries de l’Europe jusqu’au Québec, ça n’a pas de sens d’un point de vue écologique. Il faut qu’on s’établisse là-bas pour que les matériaux soient recyclés sur place », continue-t-il.
Fier que son travail et celui de son équipe fassent écho aux actions à l’échelle mondiale pour combattre les changements climatiques, le vingtenaire veut que l’entreprise obtienne du succès afin que tous les efforts mis dans l’électrification des transports finissent par payer. « Si on n’est pas capables de recycler les batteries, il y aura de gros dégâts », prévient-il.