La Greta de la Rive-Nord

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©T.D.R.
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08 mai 2021 - Maxime Bilodeau, En paix avec ses contradictions

Comme beaucoup, Marise Mathieu a décidé de passer à l’action et d’agir contre les changements climatiques pour ses enfants et ses petits-enfants. Cela ne fait pas d’elle une sainte pour autant, bien au contraire.

«Avec Greta Thunberg, ma grand-maman est la personne la plus engagée pour l’environnement que je connaisse. Grâce à elle, j’ai appris que l’huile de palme contenue dans certains aliments, comme le beurre d’arachide du supermarché, n’est pas bonne pour la planète. Elle m’a aussi expliqué que le réchauffement climatique fait fondre les calottes glaciaires, que ses enfants et ses petits-enfants pourraient en payer les conséquences, qu’il faut agir dès maintenant avant qu’il ne soit trop tard, que… »

À l’autre bout du fil, Léo Choinière-Longpré, 11 ans, livre un vibrant plaidoyer en faveur de sa mamie. Marise Mathieu, 64 ans, n’est manifestement pas une grand-mère ordinaire, et il tient mordicus à ce que l’auteur de ces lignes le sache. « Il veut vraiment vous parler », m’avait mis en garde sa mère, Virginie Choinière, la jeune quarantaine, quelques instants plus tôt. « C’est lui qui est le mieux placé pour parler de ma belle-mère ; il la suit parfois dans ses actions de Mères au front. » En plus d’être concerné au premier chef.

Quand on se serre les coudes, comme nous sommes plus de 5000 à le faire au sein de Mères au front, il n’y a plus rien d’impossible.
Marise Mathieu

Mères au front, c’est un mouvement lancé l’an dernier par la cinéaste Anaïs Barbeau-Lavalette et l’écologiste Laure Waridel. L’idée, toute simple : regrouper sous une même bannière des mères et grands-mères mues par le désir profond de protéger l’avenir de leurs descendants et la vie sur Terre, face à l’urgence climatique. « Nous devions originellement nous réunir sur la colline du Parlement, à Ottawa, pour la fête des Mères. On connaît la suite : la COVID-19 nous a fait un beau pied de nez ! » raconte Marise Mathieu.

Cela n’a toutefois pas refroidi la Deux-Montagnaise dans son désir de s’engager au sein des Mères au front de Rosemère. Depuis plus d’un an, l’enseignante à la retraite multiplie les petites actions — envoyer des lettres aux députés du coin, visiter leur bureau de circonscription — en compagnie d’un petit groupe de femmes politisées de la Rive-Nord. « J’ai mis le doigt dans l’engrenage et j’ai été emballée. Quand on se serre les coudes, comme nous sommes plus de 5000 à le faire au sein de Mères au front, il n’y a plus rien d’impossible », affirme la seule tête blanche de la section locale de Rosemère.

Agir pour se soigner

Pourtant, Marise Mathieu ne se considère pas comme une militante. Du moins, pas au sens classique du terme.« Je n’ai pas de passé militant ni d’aspirations politiques. Agir est plutôt une manière de maîtriser mon écoanxiété, de calmer mes peurs », explique-t-elle. Dans son cas, c’est le rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de 2018 qui a été le catalyseur. « Ça m’a fait capoter. Il y a eu un déclic : j’ai pris conscience de l’imminence du danger auquel nous sommes confrontés et de la lenteur, sinon de la mauvaise foi, des autorités à y réagir. »

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Marise Mathieu ©T.D.R.

Comme beaucoup, Marise Mathieu a toujours eu la fibre verte. Elle se balade avec des sacs réutilisables depuis plus de deux décennies, soit bien avant que ce ne soit commun. Ses commissions, elle les fait autant que possible à pied ou en covoiturant avec d’autres — la banlieusarde n’a pas de permis de conduire. Et hormis en de rares occasions, elle ne consomme pas de viande et se tourne plutôt vers des protéines végétales pour combler ses besoins nutritionnels. Malgré tout, elle ne se leurre pas : « Pris individuellement, mes petits gestes ne changent rien au portrait d’ensemble. »

Son passage à l’action est aussi le moyen de se réconcilier avec ses propres contradictions. Parce que là encore, comme tout le monde, la grand-mère collectionne ce qu’elle appelle pudiquement des « paradoxes ». Par exemple, elle se voit mal faire une croix sur ces longs voyages de cyclotourisme qu’elle effectue tous les deux ou trois ans en Europe. Même chose pour son chalet dans Lanaudière ; impossible pour elle et son conjoint de renoncer à ce havre de paix bien superflu.

« Nous partons tous de quelque part. Il est impossible, de nos jours, d’ouvrir un journal sans se rendre compte qu’on fait tous un peu partie du problème », observe Marise Mathieu. Plutôt que nous inciter à nous enfouir la tête dans le sable, nos paradoxes devraient, selon elle, nous motiver à redoubler d’ardeur. « L’idée, c’est de donner du sens à nos sacrifices. M’engager m’aide à maintenir et à renforcer les petits virages que j’ai déjà effectués avec, à la clé, le plus beau des cadeaux : l’espoir de changer la norme sociale, qui est peut-être le plus grand défi à l’heure actuelle. »

À en croire ses proches, c’est un tour de force qu’elle réussit au quotidien. « Marise n’impose jamais ses vues et opinions. Sa stratégie est plutôt celle de la bienveillance ; son exemple nous donne le goût de la suivre, de l’imiter, d’embarquer avec elle », assure Virginie Choinière qui, sous l’impulsion de sa belle-mère, a notamment banni les déchets des boîtes à lunch de sa famille. En toute logique, le mot de la fin revient au jeune Léo : « Depuis trois ans, je ne mange plus d’aliments contenant de l’huile de palme. Et personne ne m’a tordu le bras. » 

Cet article provient d’un cahier sur l’environnement, publié par le quotidien Le Devoir.

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