Entosystem, l’entreprise qui fait mouche

Cédric Provost
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Cédric Provost ©Amélie Cournoyer
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19 juillet 2023 - Amélie Cournoyer, journaliste de l'Initiative de journalisme local

Cédric Provost est la preuve vivante qu’entrepreneuriat et action climatique peuvent aller de pair. Le président et cofondateur d’Entosystem a réussi, avec son équipe, à rallier suffisamment de partenaires et de fonds pour construire l’une des cinq plus grosses usines de production d’insectes au monde… le tout dans l’objectif de réduire l’empreinte carbone de l’agriculture. Et ça se passe à Drummondville. Survol.

La première fois que j’ai rencontré Cédric Provost, c’était en 2019 dans le cadre de cet article pour Unpointcinq. La première usine d’Entosystem, à Sherbrooke, se trouvait dans une bâtisse en brique brune qui ne payait pas de mine. L’entrepreneur, alors à la tête d’une jeune pousse employant sept personnes, rêvait grand. Mais tout restait à faire afin de mener à bien la mission de l’entreprise : améliorer l’empreinte carbone de l’agriculture ainsi que l’autonomie et la sécurité alimentaire, le tout dans une optique zéro déchet.

Quatre ans plus tard, je lis beaucoup de fierté dans le regard de Cédric Provost lorsqu’il m’accueille, cette fois à Drummondville, sur le terrain d’une nouvelle usine de 100 000 pieds carrés (9290 m2), dotée d’un système industriel entièrement automatisé pour l’élevage d’insectes. Il m’apprend que les installations ont nécessité un investissement d’environ 70 M$. « On passe d’une entreprise qui était en mode recherche et développement depuis plusieurs années à une entreprise qui doit atteindre une rentabilité », résume Cédric Provost d’un ton calme et posé.

Ces larves, nos superhéroïnes!

Ce qui n’a pas changé depuis 2016, l’année de fondation d’Entosystem, c’est l’élevage de la mouche soldat noire. Dans l’usine, les larves de mouches se transforment en superhéroïnes de la réduction du gaspillage alimentaire. Au cours d’une période de croissance de 10 à 14 jours, une tasse de bébés mouches mangera un peu plus de 3 tonnes (t) d’aliments qui auraient autrement abouti au compost ou encore au dépotoir où ils auraient produit des gaz à effet de serre (GES).

Arrivées à maturité, les larves sont séchées : une infime partie reste entière alors que la majorité est transformée sur place en une farine et une huile hautement protéinées. Le tout est destiné à l’alimentation des animaux domestiques et d’élevage (chiens, chats, poules, poissons). Quant au résidu d’élevage, appelé frass (un mélange de restes alimentaires, de mues et de déjections), il est vendu comme engrais biologiques pour l’agriculture. En d’autres mots, une tomate en putréfaction qui entre chez Entosystem retourne sur le marché environ six jours plus tard sous forme de protéines et de fertilisant. « On réintègre les valeurs nutritives ultra rapidement dans la chaîne alimentaire », se targue Cédric Provost.

Larve de 10 jours
Larve de 10 jours ©Amélie Cournoyer

Se construire en plein cœur du Québec

Parmi les raisons pour lesquelles Entosystem a choisi Drummondville, son président cite le dynamisme de la Ville ainsi que l’implication de la Société de développement économique de Drummondville (SDED) dans le dossier. « Il y avait énormément d’incitatifs à venir s’établir ici », précise-t-il.

L’emplacement stratégique – entre Montréal et Québec – y est aussi pour beaucoup, selon lui. C’est que l’entreprise a noué un partenariat avec la multinationale québécoise Sanimax (une actionnaire), qui veillera à nourrir les larves avec des restes alimentaires provenant d’épiceries du coin.

On voulait avoir une mesure indépendante pour s’assurer que, malgré la construction de l’usine, notre consommation d’électricité et le transport, on avait un impact positif sur l’environnement.

Cédric Provost, président et cofondateur d’Entosystem

Quand l’empreinte carbone est un indicateur de performance

Chez Entosystem, les framboises moisies arriveront dans leurs casseaux et les pains tranchés « passés date » dans leur sac de plastique. Une machine s’occupera de séparer la matière organique des emballages. Ainsi, après avoir déchargé les résidus alimentaires, les camions de Sanimax ne repartiront pas vides… Que nenni! Ils seront remplis d’emballages et de contenants alimentaires qui seront brûlés dans une chaudière à biomasse pour chauffer l’usine de Lévis de l’entreprise. « On fait une optimisation des camions de Sanimax, souligne le jeune président. Tout le tonnage qu’on va traiter [environ 250 t par jour] ne mettra pratiquement pas de nouveaux camions sur la route, ce qui a vraiment aidé notre analyse d’émissions de GES. »

Ce dont Cédric Provost parle ici, c’est d’une étude indépendante commandée à la firme Enviro-accès. Cette dernière a déterminé que les activités d’Entosystem lui permettront de réduire de 85 % ses émissions de GES, ce qui équivaut à 40 000 t de CO2 par année. « On voulait avoir une mesure indépendante pour s’assurer que, malgré la construction de l’usine, notre consommation d’électricité et le transport, on avait un impact positif sur l’environnement », soutient le président, en ajoutant que l’empreinte carbone fait partie des indicateurs de performance de l’entreprise.

Défis techniques et innovation

Si les derniers paragraphes ont été écrits au futur, c’est que l’usine est toujours en construction malgré son inauguration officielle le 23 mai dernier. « On est l’une des cinq plus grandes usines de production d’insectes au monde. Il y a beaucoup de défis techniques et d’innovation. On a donc bâti l’usine en deux phases pour mieux s’ajuster en cours de route », précise encore Cédric Provost.

Au moment d’écrire ces lignes, Entosystem recrute deux ou trois personnes par semaine. À terme, environ 70 personnes seront embauchées dans la région. À cette équipe s’ajoute une vingtaine de personnes qui travaillaient à l’usine de Sherbrooke.

Il y a environ deux ans, celle-ci a dû réduire ses activités de façon importante à la suite de plaintes du voisinage, incommodé par certaines odeurs. La population drummondvilloise (les résidences les plus proches sont à 350 m à peine) devra-t-elle respirer des odeurs nauséabondes lorsque l’usine tournera à plein régime en produisant quotidiennement environ 400 millions de larves? Cédric Provost assure que non : « Depuis 2019, on a fait énormément de tests à Sherbrooke afin de trouver les meilleures technologies pour capter l’air, soutient-il. Nous utilisons un procédé breveté avec de l’iode activé. Tout l’air de l’usine est centralisé, traité, injecté dans trois cheminées avec 50 % d’air neuf puis rejeté à 100 pieds [30 m] dans l’atmosphère. »

L'usine Entosystem
L'usine Entosystem ©Amélie Cournoyer

Sur une belle lancée climatique

Si Cédric Provost fait mouche, l’équipe s’affairera bientôt à valoriser 90 000 t de résidus alimentaires et à produire 5 000 t de larves séchées et 15 000 t de fertilisant biologique.

Question de poursuivre sur sa belle lancée climatique, Entosystem est à la recherche d’une clientèle de proximité, telle que l’entreprise spécialisée dans la nourriture pour chiens et chats Jupiter, qui sera installée à moins de 2 km. « On va favoriser la clientèle locale, au Québec. Mais comme on a une très grosse production, je pense qu’on n’aura pas le choix d’exporter dans les autres provinces du Canada et aux États-Unis », explique Cédric Provost, impatient que des entreprises dans la fabrication de nourriture pour animaux à base d’insectes prennent, elles aussi, leur envol.

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