Montréal, terreau fertile pour néo-agriculteurs urbains

L'entreprise Biome de Stephan Senghor
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L'entreprise Biome de Stephan Senghor
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Réconcilier agriculture et urbanité en facilitant l’implantation de fermes urbaines commerciales et d’économie sociale un peu partout à Montréal. C’est l’ambition du programme d’accompagnement MontréalCulteurs qui a lancé un incubateur pour soutenir des entrepreneurs agricoles innovants.

 
 
Dans son local au troisième étage de l’édifice de La Centrale Agricole, une coopérative d’innovation située dans l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville, Stephan Senghor vient de franchir une étape significative. Le néo-agriculteur urbain a récolté, fin mai, ses premières laitues – 1300 pieds de frisée et de mizuna – destinées à la vente auprès des restaurateurs du quartier du Marché central. Une « satisfaction énorme » doublée d’un « accomplissement personnel » pour le quadragénaire, qui a passé les trois mois précédents à mener des tests « pour valider mes options et voir si ce que j’ai planifié se traduit dans la réalité ».

Stephan Senghor avec sa première récolte
Stephan Senghor avec sa première récolte

Le Montréalais d’origine sénégalaise pratique l’aéroponie, une technique de culture hors-sol dans laquelle les racines des légumes, salades et autres fines herbes restent à l’air et sont nourries par pulvérisation d’eau et de nutriments. « Elle permet des économies d’eau et d’engrais, d’environ 90 % et 60 %, tout en accélérant le processus de croissance des plantes », indique-t-il. Dans son espace de 500 pi2, baigné d’humidité et de lumière, il a testé depuis fin février différentes variétés de laitues et méthodes de semis. « On joue avec le temps pour accroître les rendements », explique le fondateur de l’entreprise Biome qui, à terme, veut établir un réseau de mini-fermes aux quatre coins de Montréal qui commercialiseront leur production localement.

 
 
À quelques portes de là, Medhi Ibn Brahim et Justin Dragan partagent le même objectif de développement, mais ils sont à un stade plus avancé dans leur projet. Ces deux anciens étudiants de McGill, le premier en mathématiques et informatique, le second en génie mécanique, ont créé Tulsi Farm en juin 2021. Eux pratiquent l’hydroponie pour faire pousser des légumes-feuilles (kale, mâche, micropousses, etc.), dont les racines sont plongées dans des pastilles de tourbe ou de la laine de roche avant de baigner dans des solutions nutritives adaptées à chaque plante.

Medhi Ibn Brahim et Justin Dragan
Medhi Ibn Brahim et Justin Dragan
Unités de production Tulsi Farm
Unités de production Tulsi Farm

 
Les deux associés, qui se considèrent plus comme des ingénieurs en agriculture que des agriculteurs, ont eux-mêmes conçu et imprimé en 3D les unités verticales de culture dont ils se servent. « On a passé beaucoup de temps à faire des essais-erreurs, notamment sur la germination. Notre production n’est régulière que depuis deux mois environ. On s’améliore », raconte humblement Medhi Ibn Brahim. Aujourd’hui, avec le local dont ils disposent dans le quartier Rosemont et celui à la Centrale Agricole qu’ils occupent depuis trois mois, les deux vingtenaires récoltent 40 kilos de légumes feuillus par semaine. « Notre objectif est d’augmenter notre production, car on va tenir un stand cet été au marché Jean-Talon », indique l’informaticien aux pouces verts.

Accompagnement sur mesure

Biome et Tulsi Farm ne sont pas voisins par hasard dans le bâtiment industriel de La Centrale Agricole. Les deux jeunes pousses font partie de la deuxième cohorte de l’incubateur de MontréalCulteurs, un programme d’accompagnement assez unique en son genre. Formalisé en 2021 par le Laboratoire sur l’agriculture urbaine (AU/LAB), il a bénéficié, sous ses différentes formes (ateliers, formations, service de maillage avec des gestionnaires immobiliers), à quelque 75 entrepreneurs en démarrage ces deux ou trois dernières années.

Les quatre entrepreneurs d’une cohorte, sélectionnés pour l’aspect innovant de leur projet, ont quant à eux accès à « la totale » : outre la mise à disposition, pour une durée de 10 mois, d’un espace de test à La Centrale Agricole et un diagnostic des forces et faiblesses à l’entrée, « ils suivent un parcours de formation de huit à neuf semaines, offert en partenariat avec l’École des entrepreneurs du Québec, sur les aspects démarrage, stratégie de mise en marché et croissance », indique la coordonnatrice de MontréalCulteurs, Camille Huot. Ils ont aussi accès à des ateliers sur le plan d’affaires et la recherche de financement, à 10 heures d’accompagnement « technico-économique » ainsi qu’au réseau d’experts du AU/LAB. « On les aide sur l’aspect entreprise de leur projet davantage que sur les techniques de production, qu’ils ont déjà expérimentées avant de se lancer. »

Car en plus de constituer une solution climatique – baisse des émissions de gaz à effet de serre liées au transport des aliments, lutte aux îlots de chaleur (pour en savoir plus, cliquez par ici ou par là) –, l’agriculture urbaine est avant tout une économie. Et elle tourne plutôt rond au Québec (voir encadré). « C’est une filière en émergence, il y a des opportunités de développement, convient Camille Huot. Montréal est la ville des toits plats, il y a des locaux vacants. L’enjeu, ce sont les loyers qui augmentent et les propriétaires qu’il faut sensibiliser et convaincre. »

En attendant de bénéficier du service de maillage de MontréalCulteurs, Stephan Senghor pense déjà à sa prochaine récolte. « Je vais tester la conservation de mes laitues. Le gros avantage, c’est qu’on a accès à une station de lavage et à une chambre froide à La Centrale Agricole. Sans parler du soutien des autres entrepreneurs agricoles sur place. » De son côté, Medhi Ibn Brahim se concentre sur les détails à améliorer, dans la production comme dans la distribution. « Il y en a tellement avant de voir plus grand. »

L’agriculture urbaine se porte bien au Québec

Avec 34 créations pour 12 cessations d’activité, le Québec comptait 125 fermes urbaines en 2021, en incluant les entreprises de production de cannabis et de végétaux pour l’industrie pharmaceutique. Soit 22 de plus que l’année précédente, selon le Portrait de l’agriculture urbaine commerciale au Québec en 2021, publié fin mai par le Carrefour de recherche, d’expertise et de transfert en agriculture urbaine (CRETAU). Ces 125 exploitations agricoles sont réparties un peu partout dans la province, Montréal et Québec en hébergeant plus de la moitié, soit 56 et 16 respectivement.

Au cours de l’année 2021, un tiers des 39 entreprises sondées par le CRETAU ont augmenté leur production, tandis qu’un tiers sont restées au même niveau, les autres n’ayant pas le recul nécessaire pour se prononcer. Après les vicissitudes de la pandémie, une grande majorité des agriculteurs urbains (79 %) anticipent une croissance de leur production en 2022.

Dans cette perspective, la plupart comptent embaucher du personnel, ce qui devrait se traduire par la création d’une centaine d’emplois d’ici la fin de l’année. En 2020, le CRETAU estimait à 1003 le nombre d’emplois directs dans le secteur de l’agriculture urbaine et à 342 le nombre d’emplois indirects. Les revenus du secteur étaient quant à eux estimés à 19 M$, en hausse de 12 % par rapport à 2019.

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