Verdir Montréal, une bouteille de vin à la fois

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© Katia Tobar
Created with Lunacy 4 min

30 septembre 2020 - Katia Tobar, Idéatrice en série

Au cours des trois dernières années, cinq vignobles urbains ont été plantés à Montréal, dont quatre sur des toits de bâtiments institutionnels. Unpointcinq a profité d’une journée de vendanges pour prendre le pouls de ce projet viticole qui participe au verdissement de la métropole.

Avec la collaboration de Julia Haurio.

C’est par un matin frais de la fin août que nous avons rejoint l’équipe de Vignes en ville pour des vendanges urbaines au sommet du Palais des congrès. Après avoir grimpé les étages du bâtiment coloré, nous voilà au cœur d’une véritable exploitation viticole, cernée par la tour de la Bourse, l’hôtel Westin, les sièges sociaux de Desjardins et d’Hydro-Québec et, un peu plus loin, le pont Jacques-Cartier. Une scène un brin surréaliste!

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Une véritable exploitation viticole au sommet du Palais des congrès. © Katia Tobar
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Véronique Lemieux, fondatrice du projet, trouve ça tout doux! © Katia Tobar

Il y a deux ans, nous avions rencontré Véronique Lemieux, fondatrice de Vignes en ville, un projet audacieux qui en était alors à ses balbutiements. Malgré l’engouement autour de la production de ce vin 100 % montréalais, elle précise qu’il s’agit avant tout d’« un projet d’agriculture urbaine » au service de la recherche scientifique. L’un des objectifs est d’évaluer la possibilité de cultiver de la vigne en ville afin de « réduire les îlots de chaleur tout en produisant des aliments », explique Éric Duchemin, président d’AU/LAB, le laboratoire de recherche en agriculture urbaine qui mène ce projet.

Un toit vert, ça détend l’atmosphère 

Grâce à l’isolation, à l’ombrage et au refroidissement par évaporation, verdir un toit permet de baisser sa température maximale de 70 à 25 oC. Cet avantage se traduit par une réduction de plus de 50 % de la demande énergétique pour la climatisation au printemps et en été. Et voilà qui pourrait justifier notre verre de blanc! –Laura Chouinard Thuly

Petite récolte deviendra grande?

En réduisant les îlots de chaleur, cette végétation contribuerait donc à réduire les gaz à effet de serre tout en produisant un vin local. De ces vendanges, Kevin Drouin-Léger, technicien viticole-œnologue de l’équipe de Vignes en ville prévoit obtenir de 60 à 70 bouteilles qui ne seront sans doute pas destinées à la vente. « Ça reste à confirmer, mais il est probable que la SAQ, partenaire principal du projet, en propose en dégustation lors d’événements spéciaux », indique Véronique Lemieux. 

Toutefois, il est permis d’espérer que ce vin montréalais sera commercialisé à plus long terme. Au printemps dernier, 200 ceps ont été ajoutés sur le toit de la Centrale Agricole dans Ahuntsic. Vignes en ville entretient donc désormais 545 pieds de vigne aux quatre coins de la métropole. 

Mais en attendant, il faut s’atteler à la tâche. Sécateur en main, Véronique Lemieux, épaulée de Kevin Drouin-Léger et du vinificateur Patrick Bergeron, se hâte. Il ne faut pas perdre de temps, les oiseaux ont déjà dévoré de nombreuses grappes. Le vignoble est composé de cépages rustiques résistants aux conditions climatiques du Québec : du frontenac blanc, du marquette, du frontenac noir et de la petite perle. 

Les vignes rustiques sont très résilientes et peu gourmandes en eau : quatre litres par pied tous les 15 jours, contrairement aux plants de tomates qui ont besoin d’une irrigation continue. Pour Éric Duchemin, le projet contribue donc aussi à favoriser la biodiversité urbaine et à éviter la monoculture.

C’est vraiment mon but en fait : démocratiser la culture de la vigne en ville.

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Après les vendanges sur toit, c'est le pressage du Frontenac blanc sur toit, à la Centrale agricole.

Ouvrir la voie aux vignerons en herbe

Les bacs se remplissent de grappes de raisins et sont pesés avant d’être empilés sur un chariot. Direction l’ascenseur sous l’œil ébahi des flâneurs du Palais des congrès. L’opération est délicate, les raisins ne doivent pas être écrasés pour éviter que la fermentation débute. En route vers le chai, installé dans la Centrale Agricole, pour faire le tri, le pressage et le processus de vinification. Si tout va bien, la cuvée sera prête à boire au mois de mars. 

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En une matinée, on récupère les grappes de Frontenac blanc, de Marquette et de Frontenac noir de 60 pieds de vigne. © Katia Tobar
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On trie rapidement les raisins, à la main, avant que le processus de fermentation ne débute. © Katia Tobar

Les vignes sur toit dans le monde

Vignes en ville s’inspire du projet new-yorkais Rooftop Reds, premier vignoble sur toit viable commercialement. Il y en a d’autres ailleurs, comme sur le toit de la mairie de Paris, qui, comme Vignes en ville, sont plutôt des projets de verdissement urbain et de lutte aux îlots de chaleur que des vignobles commerciaux. –Laura Chouinard Thuly

Au-delà des installations de grande envergure, Véronique Lemieux raconte qu’elle est régulièrement contactée par des particuliers qui souhaitent cultiver quelques pieds de vigne dans leur cour. Elle les conseille, mais elle a également mis en place un groupe Facebook privé pour créer un réseau de vignerons du dimanche qui s’échangent des trucs et partagent leurs bons (et moins bons) coups. « C’est vraiment mon but en fait : démocratiser la culture de la vigne en ville », dit-elle.

Un terreau pas comme les autres

Autre aspect intéressant du projet : à la place du sable, une ressource non renouvelable, on utilise du verre de couleur broyé en particules fines dans le terreau. C’est une bonne manière de réutiliser ce matériau qui, selon un rapport de RECYC-QUÉBEC publié en 2018, est encore majoritairement envoyé vers les sites d’enfouissement, faute d’être traité adéquatement dans les centres de tri. 

Au bout de deux ans, l’équipe de recherche a eu une bonne surprise : le verre a disparu des bacs. Elle soupçonne les mycorhizes, une substance issue de la rencontre entre des champignons présents dans le terreau et les racines, « d’accélérer la dégradation du verre en libérant de la silice », un des composants du verre. Il faudra attendre la fin du projet de recherche pour en être certain, mais l’on pourrait bien vivre ici les prémices d’une économie circulaire. Le verre des bouteilles de vin serait ainsi broyé et servirait à faire pousser les vignes pour les cuvées suivantes. La boucle est bouclée!

L’agriculture urbaine en plein essor

Le projet Vignes en ville s’inscrit dans une initiative à plus grande échelle d’AU/LAB d’accélérer la création d’entreprises agricoles urbaines. D’ici 2025, ces projets pourraient générer « un revenu de 260 millions de dollars » et créer « entre 3728 et 14 578 emplois directs et indirects » au Québec, selon le CRETAU (Carrefour de recherche, d’expertise et de transfert en agriculture urbaine).