Alex en Gaspésie – Pour l’amour des montagnes

Tommy Cloutier est un des premiers membres de la coopérative. Crédit Alexandre Couture
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Tommy Cloutier est un des premiers membres de la coopérative. ©Alexandre Couture

SUR LA ROUTE 2/3 – Unpointcinq m’a fait confiance et envoyé en Gaspésie, à quelque 900 km de nos bureaux du centre-ville de Montréal. J’ai pu y rencontrer des Gaspésiennes et de Gaspésiens inspirants, qui ont décidé d’agir avant qu’il ne soit trop tard. Deuxième étape du voyage : RAC City, la coop de plein air qui veut changer les choses.

Jour 2, je me réveille de bonne humeur. Peut-être est-ce l’effet de mon entrevue de la veille. C’est toujours rafraîchissant d’entendre parler de décroissance par une organisation à but lucratif. Comme quoi, l’argent ne dicte pas tout, tout le temps.

Mais mon sourire s’efface légèrement en consultant mes courriels. Ma demande de visite des enclos de caribous est au point mort. On questionne mes intentions, comme si je prévoyais kidnapper une des bêtes pour la ramener dans mon trois et demie sur le Plateau, à Montréal.

Blague à part, je comprends qu’on veuille protéger ces animaux majestueux. Je prends le temps de réexpliquer que je veux simplement parler au personnel de l’enclos et prendre deux ou trois photos. Avec toute l’honnêteté du monde, je ne veux surtout pas déranger le fragile écosystème de ces bêtes déjà en péril, mais humaniser le sujet avec un travail journalistique de terrain.

Parce que, lorsqu’on parle des caribous gaspésiens dans les médias, c’est souvent à base de statistiques extraites d’un communiqué de presse laconique. Je ne suis pas expert en communication, mais ça ne me semble pas la meilleure manière de rallier le grand public à la cause.

Je range mon ordinateur, salue la sympathique femme de ménage de mon auberge à Mont-Louis et prend ensuite la direction de Rivière-à-Claude, où m’attend Tommy. Le gaillard dans la mi-vingtaine a gentiment accepté de me faire faire le tour de RAC City, le projet qu’il partage avec quelques complices.

Vivre d’amour et de plein air

En 2018, un groupe de jeunes dans la vingtaine a décidé de s’installer au pied des magnifiques monts Chic-Chocs pour vivre en communauté. Depuis quelques années, ils et elles bâtissent tranquillement ce que Tommy appelle « une vie de rêve ».

Dans ce petit paradis loin de l’ivresse urbaine, le projet baptisé RAC City fleurit un peu plus chaque saison. Tommy m’offre la visite du propriétaire et répond à mes questions avec beaucoup de générosité alors qu’autour de nous on s’affaire à différentes tâches.

Le projet a vu le jour il y a environ cinq ans quand Antoine Blier Dufresne (seulement 18 ans à l’époque!) et trois amis ont acheté un terrain gigantesque de 45 hectares dans le but de s’y établir au cœur de la nature. De fil en aiguille, le projet a pris la forme d’une coopérative de plein air.

La yourte est un choix populaire parmi les visiteurs et visiteuses. Crédit Alexandre Couture
La yourte est un choix populaire parmi les visiteurs et visiteuses. ©Alexandre Couture

« On est une gang de trippeux de ski, m’explique Tommy, un des membres de la première heure. L’hiver, on offre des services de guide pour le ski hors-piste et, en été, on a aménagé des sentiers de vélo de montagne. »

Il faut dire que l’endroit fait rêver les adeptes de ski hors-piste, un sport qui a gagné en popularité ces dernières années au point de devenir un moteur économique important pour la Gaspésie. Lors de leurs premières visites à Rivière-à-Claude, les membres fondateurs ont vite compris qu’ils avaient un terrain de jeu majestueux sous les yeux.

Avant de continuer la visite, j’aborde le sujet des caribous avec Tommy, parce que oui, ce sujet est devenu mon obsession. Sa réponse me surprend beaucoup : il m’explique que la gestion du dossier est frustrante pour les skieurs et skieuses, qui se voient interdire la pratique de leur sport dans certains secteurs, alors que les compagnies forestières, elles, ont souvent le champ libre pour leurs activités économiques. Un deux poids deux mesures évident, selon lui. Quand je vous disais que ce n’était pas un dossier simple…

La nature est au cœur de RAC City et on garde ça en tête dans tous les petits projets d’agrandissement et d’amélioration qu’on fait. C’est notre lieu de vie, c’est important pour nous d’y vivre en accord avec nos convictions environnementales. Tommy Cloutier, membre de la coopérative RAC City

L'achat d'une motoneige a été un des premiers investissements de la communauté. Crédit Alexandre Couture.
L'achat d'une motoneige a été un des premiers investissements de la communauté. ©Alexandre Couture

S’installer dans la nature

Mais revenons à notre coop. Plusieurs installations d’hébergement ont été bâties depuis l’arrivée de la bande de potes des débuts. Des chalets, des yourtes et des cabanes dans les arbres accueillent les membres de RAC et les visiteurs et visiteuses. Tous les logements ont été construits avec des matériaux recyclés, les troncs d’arbres coupés sur le terrain même et taillés à l’aide du nouveau moulin à bois de la coop.

« La nature est au cœur de RAC City et on garde ça en tête dans tous les petits projets d’agrandissement et d’amélioration qu’on fait, dit Tommy. C’est notre lieu de vie, c’est important pour nous d’y vivre en accord avec nos convictions environnementales. »

Une dizaine de personnes vivent aujourd’hui à RAC City, une communauté basée sur l’entraide, le respect et le partage. Si l’aide est toujours la bienvenue, la coopérative ne cherche pas nécessairement à grossir ses rangs à court terme. Et pour la deuxième fois en deux jours, on me parle de décroissance.

« On a un bel équilibre en ce moment et on ne veut pas grossir pour grossir. Même dans nos activités, on veut faire attention. On s’est séparé le terrain. Éventuellement nous aurons tous nos habitations personnelles, c’est vraiment excitant », ajoute le Rimouskois d’origine en me présentant fièrement le terrain qui accueillera sa future maison.

La fierté de RAC City : une cabane dans les arbres qui peut accueillir jusqu'à quatre personnes. Crédit Alexandre Couture.
La fierté de RAC City : une cabane dans les arbres qui peut accueillir jusqu'à quatre personnes. ©Alexandre Couture

Les membres vivent sans l’électricité d’Hydro-Québec, car un branchement leur coûterait plus de 100 000 $. On envisage cette option dans le futur, mais pour l’instant le site est alimenté en électricité grâce à des panneaux solaires. 

Pour ce qui est de la vie en groupe, Tommy me confirme que « c’est organisé et organique » : « On se rencontre toutes les semaines et on a mis en place un partage des tâches qui fonctionne assez bien. Tout le monde a ses forces, on essaye de profiter de ça pour avancer nos trop nombreux projets », dit-il en rigolant. 

En marchant, on tombe sur Manu, un guide de ski qui a décidé de rester après seulement une saison hivernale. L’esprit de communauté et l’impression de contribuer à bâtir quelque chose de plus grand que lui l’ont convaincu de s’impliquer.

Je le crois sans difficulté : à RAC City, il fait bon vivre, ça se sent immédiatement.  

La toilette extérieure de la communauté, communément appelée la « bécosse » Crédit Alexandre Couture
La toilette extérieure de la communauté, communément appelée la « bécosse » ©Alexandre Couture

Garder un lien fort avec la communauté locale

Le jardin communautaire est une autre belle réussite de RAC City. Il permet aux membres de la coop de se rapprocher du village voisin de Rivière-à-Claude, un aspect primordial selon Tommy.

Pilotée par la maraîchère Laurence, l’équipe cultive ses terres pour offrir des légumes été comme hiver aux populations locales. Dans le passé, la Coop a approvisionné des restaurants et des marchés de la région. Une belle manière de créer un lien avec les voisins et voisines.

« On organise des marchés, on fait de la bouffe, les gens passent et on discute, c’est vraiment le fun, ajoute-t-il. Ils ont appris à nous connaître et nous aiment bien, je pense [rires]. »

La coopérative priorise une agriculture en sol vivant. Laurence et son équipe évitent le plus possible d’utiliser des intrants provenant de l’extérieur, selon les règles de la permaculture. Leur démarche adhère aux principes du développement durable et s’effectue dans le respect de l’environnement.

À mon passage, on préparait tranquillement la prochaine saison maraîchère. Crédit Alexandre Couture.
À mon passage, on préparait tranquillement la prochaine saison maraîchère. ©Alexandre Couture

Tous les revenus, que ce soit du ski hors-piste, du vélo de montagne ou de la vente de légumes sont mis dans un pot commun qui sert à réaliser les projets de RAC City, me confirment les membres. Ceux et celles qui ont les qualifications de guides de ski hors-piste reçoivent aussi un salaire pour leur travail.

Après avoir marché une partie de l’après-midi autour du terrain de RAC City, c’est l’heure de remercier Tommy et de lui souhaiter bonne chance pour la suite. Même si je ne pense pas que cette petite bande ait vraiment besoin de chance, tant elle a développé un magnifique modèle de vie en communauté, basé sur des valeurs communes fortes et un sens de l’entraide beau à voir.

Dans une optique de résilience face aux changements climatiques, ces personnes font figure de modèles. En plus de respecter la nature qui les entoure, elles se sont assuré d’établir un lien fort avec la population locale. Une sorte de cohésion environnementale et sociale.

Pour une deuxième journée, je retourne à mon auberge avec le sourire. Si, la plupart du temps, l’actualité environnementale est un peu déprimante, voir des gens de toutes les générations s’impliquer dans l’action climatique est un véritable baume. Un rappel important que la fameuse transition écologique passera inévitablement par la solidarité. Les membres de RAC City l’ont déjà compris.

POUR LIRE LA PARTIE 3

Un démantèlement de bateau écoresponsable, une première au Québec

Dans la troisième et ultime partie de mon reportage, je vous amène aux confins de la région, à Rivière-au-Renard. Dans ce village qui vit en grande partie de l’industrie de la pêche, un groupe de personnes veut révolutionner la manière de disposer d’un navire en fin de vie. Un projet écoresponsable inédit au Québec qui pourrait changer bien des choses! 

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