Quelles solutions pour réduire l’empreinte carbone du transport aérien?

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©Pixelbliss/Shutterstock
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Cloués au sol pendant de nombreux mois, les avions du pays recommencent progressivement à voler. Cette reprise du trafic aérien est-elle compatible avec les objectifs mondiaux de réduction des gaz à effet de serre (GES)?

En 2019, la jeune militante suédoise Greta Thunberg choisissait de se rendre au sommet de l’ONU pour le climat, à New York, en voilier plutôt qu’en avion pour limiter les émissions de GES. Son geste a entraîné une prise de conscience sur l’empreinte carbone du transport aérien et la popularisation du mouvement suédois Flygskam, soit la honte de prendre l’avion que ressent une personne sensibilisée à la cause du climat. L’avion est certes le moyen de transport ayant la plus grande empreinte carbone : par kilomètre et par passager, il émet de deux à six fois plus de GES qu’une voiture (selon sa superficie et le nombre de passagers) et, globalement, il représente autour de 3 % des émissions de GES sur la planète.

Thierry Lefèvre travaille comme professionnel de recherche à l’Université Laval et est cofondateur du regroupement Des Universitaires qui rassemble des chercheurs et des chercheuses qui prennent position publiquement en faveur de la lutte aux changements climatiques. Il s’inquiète de la reprise des activités aériennes et croit que les utilisateurs ont une responsabilité. « Il faudrait réduire le nombre de voyages et les distances parcourues, surtout qu’il y a une quantité significative de voyages qui sont non essentiels », considère-t-il.

Faire Montréal-Québec en avion, c’est une aberration! Ça n’a aucun sens! Par contre, Montréal-Pékin, Montréal-Tokyo ou Montréal-Paris, il ne peut pas avoir autre chose que l’avion.
Mehran Ebrahimi, directeur de l’Observatoire international de l’aéronautique et de l’aviation civile de l’UQAM

Limiter les voyages d’affaires

Selon une étude publiée dans la revue scientifique Global Environmental Change en 2020, 1 % de la population mondiale serait responsable de 50 % du CO₂ émis par le transport aérien. En modifiant leurs habitudes, les grands voyageurs, notamment ceux qui se déplacent pour affaires, pourraient donc avoir une grande influence sur la réduction des émissions polluantes. Selon Jacques Roy, professeur en gestion des transports à HEC Montréal, en généralisant le travail à distance, la pandémie de COVID-19 pourrait changer la donne. « Par souci environnemental, mais aussi pour des raisons d’économie et de sécurité, les voyageurs d’affaires vont peut-être choisir de se réunir davantage à distance et de voyager moins souvent, mais plus longtemps. Au lieu de faire un aller-retour à Toronto pour rencontrer un client, ils pourraient partir pour trois jours et en profiter pour en voir plusieurs en un seul déplacement. »

Le projet Drawdown, une initiative de 70 chercheurs qui propose une série de solutions climatiques, estime qu’en remplaçant de 486 à 676 millions de voyages d’affaires par des réunions virtuelles ou par l’usage de robots de téléprésence d’ici 2050, on pourrait éviter de 1 à 3,8 gigatonnes de CO₂. S’il ne croit pas que le boycottage aérien soit une solution, le directeur de l’Observatoire international de l’aéronautique et de l’aviation civile de l’UQAM, Mehran Ebrahimi, reconnaît de son côté qu’une réflexion sur une utilisation responsable est pertinente. « Faire Montréal-Québec en avion, c’est une aberration! Ça n’a aucun sens! Par contre, Montréal-Pékin, Montréal-Tokyo ou Montréal-Paris, il ne peut pas avoir autre chose que l’avion », affirme-t-il.

Des solutions sur le tarmac

En mars dernier, Air Canada annonçait qu’elle se donnait l’objectif d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050. D’ici 2030, la compagnie aérienne s’est également fixé des objectifs de réduction nette de 20 % de ses GES pour les vols et de 30 % pour les opérations au sol par rapport à 2019.

Selon Mehran Ebrahimi, les compagnies aériennes ont réduit de 70 % leur consommation de kérosène par siège pour 100 km parcourus au cours des 40 dernières années. « Il faut être honnête, ce n’est pas par souci écologique. C’est essentiellement parce que ces coûts sont relativement importants », souligne-t-il.

Pour atteindre ce résultat, les compagnies ont mis en place plusieurs mesures : raccourcir les distances parcourues sur le tarmac avant les décollages et après les atterrissages, limiter, sans danger, la puissance des moteurs lors des décollages ou se doter de technologies qui permettent un pilotage plus précis et moins de gaspillage d’énergie.

Pour devenir vert, il faut acheter des appareils verts, mais ils n’existent pas pour le moment. Les changements radicaux vont venir avec les nouvelles technologies et avec les nouveaux carburants.
Jacques Roy, professeur en gestion des transports à HEC Montréal

Taxes et politiques

Avant la pandémie, l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) estimait que le trafic aérien allait tripler de 2020 à 2050. Si cette croissance reprend comme prévu, elle pourrait être inquiétante pour le climat, selon les auteurs de l’étude parue dans Global Environmental Change, car les politiques actuelles ne sont pas adéquates pour réglementer les émissions du trafic aérien. En effet, le protocole de Kyoto et l’Accord de Paris exemptent le secteur de l’aviation de la contribution des pays en raison de son caractère transfrontalier.

L’Europe a néanmoins décidé de légiférer sur son territoire. Depuis 2020, la France impose une « écotaxe » à l’achat d’un billet d’avion. Selon la destination et la classe, les passagers doivent débourser entre 1,50 € et 18 € de plus. La Commission européenne, quant à elle, a annoncé en juillet dernier vouloir taxer progressivement le kérosène pour les vols effectués à l’intérieur de l’Union européenne à partir de 2023. La mesure fait grandement réagir, notamment l’Association du transport aérien international (IATA) qui croit que les gouvernements devraient davantage investir dans les carburants durables.

Il y a à peu près juste l’hydrogène qui permettrait de dégager assez de puissance et d’énergie pour faire voler un gros appareil.
Jacques Roy, professeur en gestion des transports à HEC Montréal

Nouveaux appareils et biocarburants

Pour atteindre la carboneutralité, Air Canada s’engage également à investir dans les carburants durables. « Pour devenir vert, il faut acheter des appareils verts, mais ils n’existent pas pour le moment. Les changements radicaux vont venir avec les nouvelles technologies et avec les nouveaux carburants », indique Jacques Roy.

L’Observatoire international de l’aéronautique et de l’aviation civile de l’UQAM s’intéresse justement aux effets des carburants alternatifs. Mehran Ebrahimi croit que ceux produits à partir d’huiles de friture usées sont intéressants, car ils permettent la réutilisation d’un déchet déjà généré. Cependant, leur transport jusqu’aux aéroports émet aussi des GES. Quant aux carburants produits grâce à des végétaux, ils ne représentent pas « une vraie solution », selon lui, puisqu’ils nécessiteraient l’utilisation de nombreuses terres agricoles et encourageraient la monoculture.

Jacques Roy voit les biocarburants comme une énergie de transition. Selon lui, c’est l’hydrogène (idéalement vert) qui a le plus de potentiel pour l’aéronautique. « Il y a à peu près juste l’hydrogène qui permettrait de dégager assez de puissance et d’énergie pour faire voler un gros appareil. Les batteries électriques n’y arriveront pas. L’hydrogène vert n’émet que de l’eau et de la chaleur et se transforme en électricité et c’est ce qui fait fonctionner le véhicule », explique-t-il.

L’an dernier, la France a d’ailleurs accordé 1,5 milliard d’euros à Airbus pour créer un avion propulsé par cette énergie et qui serait fonctionnel vers 2050. Les recherches sont en cours, mais la tâche n’est pas simple, car il faut trouver une façon moins polluante de produire l’hydrogène, sans compter les nombreux enjeux reliés à son entreposage et son transport. « C’est surtout une question de coûts. L’idéal, c’est qu’il y ait une station sur place, à l’aéroport, et que l’hydrogène soit produit tout près », mentionne Jacques Roy.

Des formules hybrides sont également explorées. Ainsi, le Consortium SAF+, une entreprise québécoise spécialisée dans le développement de carburants propres veut produire un combustible synthétique combinant le CO₂ provenant de sources industrielles à de l’hydrogène vert produit au Québec. Les idées pour décarboner les carburants ne manquent pas, mais d’après le Shift Project, un groupe de réflexion en faveur d’une économie faible en carbone, une baisse importante des émissions de GES passera forcément par une diminution du trafic aérien.

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