Alex en Estrie — Vivre d’amour, mais surtout d’eau fraîche

La ville de Sutton est située dans la MRC de Brome-Missisquoi
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La ville de Sutton est située dans la MRC de Brome-Missisquoi ©Alexandre Couture
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Retombées positives générales

SUR LA ROUTE 2/3 — Aux quatre coins du Québec, des gens s’activent pour faire une véritable différence dans la crise écologique. Pour ce deuxième dossier régional, nous avons décidé de poser notre regard sur l’Estrie. Une région qui est aux prises avec son lot de défis environnementaux, mais qui est également dotée d’une impressionnante créativité pour y faire face. Deuxième étape : la ville de Sutton, où l’eau est un défi de taille.

Ma rencontre avec Stéphanie Hilton de la ferme collective Les Cocagnes m’a ouvert plus grand les yeux sur la réalité des gens qui pratiquent l’agriculture. Leur résilience est mise à l’épreuve sur une base quotidienne. En plus d’avoir un travail complètement drainant, le fruit de leurs efforts dépend d’une foule de variables hors de leur contrôle.

Je parle ici des aléas climatiques. Une bonne récolte annuelle peut passer de merveilleuse à catastrophique en un claquement de doigts (d’accord, ça prend un peu plus de temps, mais vous comprenez l’image). Après deux années difficiles marquées par des sécheresses, la population estrienne a dû composer, en 2023, avec des pluies diluviennes, tout aussi dommageables pour certaines cultures.

Les données le prouvent, ces conditions extrêmes viennent de plus en plus compliquer les activités du monde agricole. Selon un rapport du groupe Ouranos, le consortium sur la climatologie régionale et l’adaptation aux changements climatiques, les températures en Estrie devraient être en moyenne plus élevées de 2,6 °C d’ici 2050, et connaître une augmentation considérable des canicules.

« Avec les changements climatiques, on peut s’attendre à une montée des températures moyennes, des épisodes de grande chaleur et des périodes prolongées sans précipitations, notamment dans le sud du Québec, m’a expliqué Angelica Alberti-Dufort, spécialiste en recherche et en transfert des connaissances chez Ouranos. On peut penser que ces conditions engendrent un plus grand stress hydrique. »

L’expression « stress hydrique » ne vous dit peut-être rien, mais on parle bien de pénurie d’eau ici. Un danger aux conséquences catastrophiques qui guette plusieurs municipalités du sud du Québec. Pour moi, le déclic s’est fait l’an dernier. Une nouvelle dans l’actualité avait piqué ma curiosité : « Halte à la construction pour préserver l’eau à Sutton. »

La municipalité de Sutton a décidé de mettre un frein au développement immobilier. Soyons honnêtes, il est rare de voir le développement immobilier se faire mettre des bâtons dans les roues. Normalement, c’est un domaine extrêmement lucratif qui fonce sans trop poser de questions.

C’est pourquoi cette décision de la municipalité m’avait quelque peu étonné. Je suis donc allé à la source, à la rencontre du maire de Sutton, Robert Benoît, pour comprendre le défi auquel sa ville fait face et la réflexion derrière leur décision.

La ville de Sutton est alimentée en eau par deux systèmes, un pour le secteur de la montagne et l'autre pour le village
La ville de Sutton est alimentée en eau par deux systèmes, un pour le secteur de la montagne et l'autre pour le village ©Shutterstock

Aux grands maux, les grands remèdes

C’est samedi, le marché public bat son plein sous un beau soleil de septembre. Familles, producteurs agricoles locaux et touristes se mélangent dans la bonne humeur. Les différents kiosques proposent un aperçu de la riche offre alimentaire de la région.

Il fait bon vivre à Sutton, c’est une évidence. Avec ses petits commerces, son art omniprésent et la nature qui l’entoure, la ville nous donne envie de s’y installer pour couler des jours heureux. L’hiver, elle accueille les amoureux et amoureuses des sports de glisse.

Ces caractéristiques attirent depuis longtemps les promoteurs et promotrices immobilier.ère.s qui ont flairé la bonne affaire. La montagne est particulièrement prisée pour son potentiel économique. Le seul problème : le secteur pourrait manquer d’eau si le développement se poursuit.

Cette prophétie ne vient pas de moi, mais d’un rapport rendu public en 2022. Le secteur du mont Sutton est particulièrement fragile, son alimentation venant de l’eau de surface des lacs et des ruisseaux environnants. Lorsque les canicules et les sécheresses frappent, le stress hydrique devient critique.

« Dans les 20-30 dernières années, de nombreux projets de condominiums ont été développés dans ce secteur. Là, on est arrivés à un point de saturation entre l’offre et la demande d’eau », corrobore Robert Benoît, maire depuis 2021.

Les montagnes autour de la ville de Sutton en font une destination touristique de choix
Les montagnes autour de la ville de Sutton en font une destination touristique de choix ©Shutterstock

La firme chargée de mener l’étude a recommandé à la Ville de « cesser de délivrer des permis de construire dans le secteur de la montagne afin de ne pas aggraver la situation de manque d’eau, le temps qu’une solution soit mise en place ».

Devant cet avertissement, disons-le alarmant, Sutton est passée à l’action.

« On a décidé de décréter un moratoire dans la partie sud du mont Sutton pour nous assurer qu’il n’y a pas de nouvelles constructions, justement pour éviter un déséquilibre entre les besoins en eau et les ressources disponibles, poursuit-il. La réalité, c’est qu’on avait 800 condos en développement sur la montagne. Mais si on continuait, on allait avoir un grave problème. »

Selon l’administration en place, même si la décision a fait sourciller un certain nombre de promoteurs et de promotrices, la population l’a très bien accueillie. Il faut dire que manquer d’eau dans ses robinets, comme la population de Sutton l’a expérimenté en 2020 et 2021, ne laisse pas beaucoup de place au scepticisme.

« Je pense que tout le monde a compris qu’on avait un sérieux problème et qu’on devait trouver une solution », laisse-t-il tomber, comme si la réaction des gens l’avait rassuré d’une certaine manière.

Le maire Robert Benoît lors d'une présentation à l'Hôtel de ville devant les citoyens et citoyennes
Le maire Robert Benoît lors d'une présentation à l'Hôtel de ville devant les citoyens et citoyennes ©Courtoisie Ville de Sutton

 Je pense que c’est une responsabilité partagée, avance-t-il. Du côté des villes et des villages, on a longtemps pris des décisions selon la philosophie ‘‘on verra plus tard s’il y a des impacts’’. On doit maintenant appliquer le principe de précaution. Individuellement, on doit aussi se demander si notre consommation est adaptée à la réalité des changements climatiques.Robert Benoît, maire de Sutton

Revoir notre relation avec l’eau

Pour le maire, qui a eu une longue carrière comme cadre à Hydro-Québec, la vision de la population québécoise par rapport à sa consommation d’eau devra elle aussi évoluer dans les prochaines années.

« C’est comme l’électricité : on a longtemps eu l’impression que c’était une ressource illimitée, et là, on se rend compte qu’on doit trouver les moyens d’en produire toujours plus pour subvenir à la demande, donne-t-il en exemple. L’eau, c’est pareil. On a besoin de faire de la sensibilisation. »

Cette sensibilisation passe nécessairement par un changement des habitudes de consommation. Je ne sais pas pour vous, mais j’ai grandi en voyant le voisinage arroser son asphalte pour la nettoyer. Un non-sens qui a longtemps été la norme.

Pour Robert Benoît, le manque d’eau qui a frappé plusieurs municipalités du Québec est une bonne occasion pour avoir une réflexion collective sur la question. D’ailleurs, Sutton dévoilera bientôt le résultat d’études sur la capacité de recharge de la nappe phréatique qui alimente la ville, une information cruciale qui guidera les futures décisions.

« Je pense que c’est une responsabilité partagée, avance-t-il. Du côté des villes et des villages, on a longtemps pris des décisions selon la philosophie ‘‘on verra plus tard s’il y a des impacts’’. On doit maintenant appliquer le principe de précaution. Individuellement, on doit aussi se demander si notre consommation est adaptée à la réalité des changements climatiques. »

Les changements climatiques bousculent nos vies, nos habitudes, nous en avons la preuve chaque jour. La Ville de Sutton a pris le taureau par les cornes dans ce dossier et a réussi à freiner l’hémorragie avant qu’il ne soit trop tard. Le développement économique ne peut pas avoir préséance en tout temps, et la question de l’eau à Sutton en est une illustration frappante.

De bonnes nouvelles et une leçon pour l’avenir

Quelques semaines après la parution de notre dossier, Sutton a présenté les résultats d’une étude sur la capacité de recharge de sa nappe phréatique. Selon les chiffres avancés, la Ville dispose de presque six fois plus d’eau que sa consommation actuelle, grâce au puits Academy et l’ajout éventuel d’un deuxième puits. D’excellentes nouvelles, mais que le maire Benoit a quand même tenu à accompagner d’une mise en garde: « La population peut maintenant être rassurée, Sutton a des ressources d’eau potable substantielles, a-t-il déclaré. Ce n’est toutefois pas une raison pour gaspiller cette richesse et nous devons augmenter nos efforts personnels et collectifs pour mieux la consommer et la protéger. » Les habitants et habitantes de Sutton ont eu la frousse, mais est-ce que ce sera suffisant pour les convaincre de changer leurs habitudes? À suivre!

POUR LIRE LA PARTIE 3

Donner une deuxième chance aux plantes

Pour la dernière étape de mon dossier sur l’Estrie, je vous amène à Sherbrooke où un OBNL s’est donné la grande mission de sauver les arbres et les végétaux des chantiers de construction. Une solution d’adaptation qui mise sur la communauté! 

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