Faites ce que je dis… et ce que je fais!

avion au décollage à Montréal pour illustrer un article sur les poids carbone des voyages des chercheurs
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© CaymanPlaneSpotter
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30 septembre 2019 - Maxime Bilodeau, En paix avec ses contradictions

Bien conscients des quantités de gaz à effet de serre émises par les conférences, réunions et autres activités scientifiques auxquelles ils participent, des chercheurs passent à l’action au nom d’une certaine cohérence climatique.

Chercheur à Ressources naturelles Canada, Richard Fernandes s’est lancé en 2018 dans de savants calculs pour mesurer l’empreinte carbone de ses activités professionnelles, qui consistent entre autres à participer à des congrès et à mener des recherches sur le terrain aux quatre coins du globe. Le résultat l’a estomaqué! Ce résident de la région Ottawa-Gatineau émet chaque année pas moins de huit tonnes d’équivalent CO2 au boulot, soit près de la moitié du bilan carbone annuel d’un Canadien. Ayoye!

Comme de nombreux scientifiques, Richard Fernandes est conscient de son statut de cordonnier mal chaussé. C’est pourquoi il s’est récemment engagé à réduire ses déplacements professionnels en avion. Il n’est pas le seul : plus de 200 de ses collègues – surtout des spécialistes du climat, en plus – on fait la même promesse sur la plateforme américaine No Fly Climate Sci. Le collectif français Labos 1point5, qui regroupe plus de 1250 chercheurs francophones de différentes disciplines à travers le monde, mène aussi une réflexion en ce sens.

Empreinte de pragmatisme, la démarche du chercheur canadien se veut autant une manière de donner l’exemple que d’être cohérent avec ses propres valeurs. « Je travaille sur des projections climatiques depuis plusieurs décennies, notamment en collaboration avec l’Agence spatiale européenne. C’est très motivant, mais encore faut-il que je passe à l’action face aux changements climatiques que je prédis! » s’exclame-t-il. Faites ce que je dis, pas ce que je fais? Très peu pour lui.

Son souhait le plus cher : que la communauté scientifique adopte des options de diffusion des connaissances moins dommageables pour la planète, par exemple des visioconférences. Cela se fait déjà ailleurs. En Suisse, l’École polytechnique fédérale de Zurich a déployé une palette d’outils conséquents comme l’offre de billets de train pour les trajets de courte distance. L’établissement rend également public son bilan carbone annuel, dans lequel figurent les voyages professionnels du personnel enseignant.

10 %

Selon une étude publiée dans Sustainability en 2018, 10 % des chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne émettraient 60 % des gaz à effet de serre (GES) provenant des trajets en avion des membres du personnel de cet établissement. Et en moyenne, les professeurs seraient responsables de 10 fois plus de GES que les doctorants.

Au Québec aussi

Les chercheurs québécois et leurs partenaires ne sont pas en reste. En avril 2019, le Palais des congrès de Montréal, où se tiennent annuellement de nombreux congrès scientifiques, s’est engagé à atteindre la carboneutralité d’ici 2030. Pour ce faire, il proposera notamment aux organisateurs d’événements de compenser les émissions de gaz à effet de serre (GES) associées aux déplacements des participants par la plantation d’arbres ou l’achat de crédits carbone éducatifsMD, qui financent des activités de sensibilisation dans les écoles québécoises. Un bon début.

Les membres de l’Association de la maîtrise en environnement de l’Université de Sherbrooke (AMEUS) vont beaucoup plus loin. Pour le colloque intitulé Ralentir pour mieux bâtir : la décroissance, pour une société plus résiliente et équitable?, qui s’est tenu en mars 2019, le comité organisateur s’est astreint aux critères les plus sévères de la norme en gestion responsable d’événements émise par le Bureau de normalisation du Québec, mieux connue sous le nom de BNQ 9700-253.

Mise de l’avant depuis 2011 par l’Université de Sherbrooke (UdeS), cette norme couvre tous les aspects inhérents à l’organisation d’un événement, de la gestion de l’énergie consommée aux transports en passant par la provenance des fournisseurs, explique Julia Roy-Touchette, co-coordonnatrice du dernier colloque de l’AMEUS. « Le but est de minimiser nos impacts environnementaux dans chacune de ces sphères. Du jour 1 de l’organisation jusqu’à la date de l’événement, toutes les émissions de GES sont prises en compte », précise-t-elle.

Les 209 participants au colloque ont ainsi été invités à covoiturer ou à monter dans un autobus nolisé par l’AMEUS à partir du campus longueuillois de l’UdeS. Une fois sur place, pas de gobelets de café individuels ni d’aliments suremballés ou venant de l’autre bout de la planète; lors des collations et repas, chacun devait apporter sa tasse réutilisable et se servir à un buffet de mets biologiques, équitables et locaux. Heureusement, il faisait beau ce jour-là (-1 °C, sans précipitations), ce qui a permis de chauffer les lieux à partir d’hydroélectricité, une énergie propre (plutôt sur de servir d’un système de chauffage alternatif, comme celui au mazout.

Des voyageurs aguerris

Une étude parue en 2019 dans Environmental Research Letters s’intéresse aux déplacements des professeurs de l’Université de Montréal. Avec une moyenne de sept voyages, chacun parcourt environ 33 000 kilomètres par an et émet ainsi 10,7 tonnes d’équivalent CO2, soit une tonne de plus qu’un Québécois moyen n’en émet en une année.

La preuve par l’exemple

Le jeu en a valu la chandelle : ce colloque de l’AMEUS a généré un total de 2,9 tonnes d’équivalent CO2, soit environ 10 kg de CO2 par participant, l’équivalent d’un trajet de 50 km en voiture. Cette bagatelle a d’ailleurs été compensée par ECOTIERRA, une entreprise sherbrookoise qui émet des crédits carbone et qui réinvestit les sommes amassées dans des cultures coopératives de cacao et de café à l’étranger. Tout en le relativisant, Julia Roy-Touchette se réjouit de ce bilan. « Notre événement n’est pas d’envergure internationale : aucun participant n’a pris l’avion pour y assister! Ceci étant dit, nous avons prouvé qu’il est possible de diffuser les connaissances tout en ne nuisant pas au climat », conclut la co-coordonnatrice, aussi étudiante à la maîtrise en gestion de l’environnement à l’UdeS.