De la bière changée en pain

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©Courtoisie
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Retombées positives générales

Dans chaque pinte de bière que nous buvons se cache une pinte de drêches. En transformant ces résidus de brassage des microbrasseries de Montréal en « super farine », les quatre jeunes entrepreneurs derrière la Coop Boomerang luttent contre le gaspillage alimentaire. Portrait d’un projet d’économie circulaire qui n’est pas né pour un p’tit pain!

Tangui Conrad et Mathieu Gauthier étudiaient tous les deux en Suède, en administration des affaires, quand ils ont réalisé un mémoire sur les perspectives économiques découlant de la valorisation des restes de l’industrie agroalimentaire. « On n’avait aucune idée de ce qu’était la drêche. C’est là qu’on a été initiés aux fameuses céréales résiduelles générées par la production de bière », raconte Mathieu Gauthier, cofondateur de la Coop Boomerang.

Une fois installés à Montréal pour leurs études de maîtrise en management et développement durable à HEC, ils s’associent à deux autres étudiants, Basile Thisse et Alexis Galand, pour présenter un projet de revalorisation des drêches à un concours d’innovation. « Ce qui nous a réunis au départ, c’est la réduction du gaspillage alimentaire et la volonté d’agir au niveau des résidus de production, explique Mathieu Gauthier. Et avec la crise environnementale qu’on traverse, ce n’est pas en restant tout seul qu’on pourra faire une quelconque différence. » En remportant le prix de la thématique Environnement et celui du défi d’entreprise Ville de Montréal au Coopérathon 2019, ils reçoivent le coup de pouce dont ils avaient besoin pour concrétiser leur projet. « Et [à partir] de là, tout est devenu beaucoup plus sérieux », se souvient en riant Mathieu Gauthier.

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Les quatre associés à la tête de la Coop Boomerang ont remporté le défi d’entreprise Ville de Montréal au Coopérathon 2019. ©Coopérathon

Des résidus partout dans la métropole

Les quatre jeunes hommes forment alors une coopérative et vont à la rencontre des microbrasseurs montréalais afin de savoir ce que ceux-ci font de leurs drêches. Ils constatent qu’il existe déjà plusieurs solutions en place, mais que le tout n’est pas structuré.

Sur les 46 brasseries que compte l’île de Montréal, certaines envoient leurs résidus au compost. Plusieurs font affaire avec des agriculteurs qui les utilisent pour nourrir leur bétail, et d’autres ont établi un partenariat avec une entreprise privée qui emporte la drêche à l’enfouissement. Certains brasseurs traitent avec le même fournisseur, mais selon une tarification différente.

Si les microbrasseurs trouvent intéressante l’idée de valoriser la drêche en la transformant en farine, certains sont craintifs à l’idée d’abandonner leur façon de faire actuelle pour s’associer à la coopérative. Pour Mathieu Gauthier, il est normal que les brasseurs éprouvent une certaine réticence devant cette solution nouvelle et se questionnent sur la capacité de livrer de Boomerang. De plus, les brasseurs souhaitent simplifier la gestion de leur drêche en ne faisant affaire qu’avec un seul interlocuteur.

Mais Mathieu Gauthier et ses acolytes ne manquent pas d’arguments. Ils proposent un service clés en main pour revaloriser les drêches au meilleur de leur potentiel. « L’idée est de tisser des partenariats gagnant-gagnant », résume Mathieu Gauthier. 

Un impact significatif

RECYC-QUÉBEC estime qu’une fois que la coopérative aura atteint son plein potentiel (soit qu’elle sera en mesure de revaloriser 120 tonnes de drêches par année), elle présentera un potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 54 tonnes d’équivalent CO2 par année, ce qui équivaut à environ 43 allers-retours Montréal-Paris en avion.  

À Montréal, les 46 microbrasseries de l’île produisent 3500 tonnes de résidus par année, selon des calculs que la Coop Boomerang a effectués à partir des statistiques de l’Association des microbrasseries du Québec (AMBQ) sur les volumes de drêches générés dans la province.

Un premier partenariat s’est finalement noué l’hiver dernier avec la brasserie Belle Gueule. La Coop Boomerang travaille aujourd’hui à élargir ses activités à d’autres entreprises brassicoles.

Des microbrasseries aux boulangeries

Ça goûte quoi, un pain à la drêche? Le produit a une odeur de malt qui rappelle le miel, d’après Tangui Conrad. « Ça a vraiment un goût torréfié, proche du chocolat-caramel », explique-t-il. Le pain présente une croûte plus caramélisée et « une mie plus dense [avec] une coloration plus foncée », poursuit Mathieu Gauthier.

Quatre boulangeries utilisent actuellement la farine produite par la coopérative pour confectionner une miche à la drêche de bière : la boulangerie Saint-Vincent à Montréal, La Grigne à Joliette, la Mie Richard à Val-David et Au cœur du pain à Sherbrooke. « On aime bien l’appeler la “super farine” parce qu’elle a des propriétés vraiment intéressantes », ajoute Mathieu Gauthier. Il cite la teneur élevée en protéines et en fibres pour peu de gluten et de calories. Certaines épiceries (BocoBoco, Vrac en folie, Ô Poids vert et Vrac sur Roues) vendent également de la farine de drêches directement aux consommateurs.

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©Infographie Coop Boomerang

En général, on combine la farine de drêches à une autre farine pour obtenir de meilleurs résultats, et les proportions varient selon le type de recette. Par exemple, pour faire du pain, Mathieu Gauthier suggère d’utiliser 10 % de farine de drêches et 90 % de farine tout usage. Une préparation pour biscuits pourrait néanmoins être confectionnée uniquement à partir de farine de drêches.

Revaloriser à plus grande échelle

Le projet pilote mené en collaboration avec la brasserie Belle Gueule a permis de détourner près de deux tonnes de drêches de l’enfouissement, affirme Mathieu Gauthier. « On vient d’investir dans des machines. On va pouvoir désormais traiter la même quantité de résidus par mois », ajoute-t-il.

Prochaine étape : l’entreprise prévoit être en mesure de traiter 10 tonnes de résidus mensuellement, dès le début de l’automne, en investissant de nouveau dans des équipements plus performants.

La Coop Boomerang aimerait éventuellement élargir ses activités à la revalorisation d’autres résidus alimentaires comme la pulpe de soja ou de fruits et les coquilles d’œufs, entre autres. Elle envisage également de se lancer dans la création de mélanges à biscuits ou à crêpes.

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Mais les ambitions des entrepreneurs ne s’arrêtent pas là : ils souhaitent aussi exporter le modèle qu’ils ont développé à Montréal à d’autres centres urbains au Québec, au Canada, voire à l’international. « De la drêche, il y en a! Et notre but, c’est de pouvoir apporter une solution à plus grande échelle. Ça, c’est vraiment notre projet », conclut Mathieu Gauthier.

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