Faire découvrir des légumes frais africains aux Québécois et Québécoises, c’est ce que propose Hamidou Maiga. En offrant des saveurs méconnues, le propriétaire d’Hamidou Horticulture encourage l’alimentation locale et l’agriculture urbaine.
C’est parce qu’il peinait à se procurer les légumes de son Niger natal pour cuisiner et qu’il n’a pas réussi à obtenir d’équivalence au Canada de son diplôme en comptabilité décroché là-bas qu’Hamidou a décidé de s’inscrire à un DEC en horticulture. « Le seul endroit où on en trouvait ici, c’était dans certaines épiceries africaines. Mais ils étaient vendus sous forme congelée, séchée, pas sous forme de légumes frais », se souvient celui qui a terminé sa spécialisation en culture maraîchère et fruitière à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec (ITAQ) en 2014.
Avant de s’installer au Québec en 2008, Hamidou s’occupait déjà des arbres fruitiers sur les terres familiales : des manguiers, des figuiers, des citronniers, des goyaviers, des dattiers. « J’avais créé une petite entreprise, un peu sur le concept des paniers bios. Et on faisait la livraison une fois par semaine », se souvient-il.
Diplôme de l’ITAQ en main, Hamidou a découvert l’enthousiasme des Montréalais et Montréalaises pour les produits africains lorsqu’il travaillait dans une pépinière. « Ils m’avaient demandé de proposer certaines variétés de légumes pour bonifier leur offre. Et quand j’ai vu l’engouement des gens, je me suis dit que ce serait peut-être intéressant de creuser ce filon-là », explique-t-il.
On sensibilise les gens à cultiver eux-mêmes leurs légumes. On les conscientise à l’idée de ne pas utiliser toutes sortes d’intrants ou de pesticides chimiques nocifs pour la santé et pour la préservation de la vie du sol et de toute la biodiversité qui permet à la planète d’être plus résiliente.
Un peu d’exotisme en sol québécois
Oseille africaine, hibiscus, différentes variétés d’okras… Hamidou fait pousser de nombreuses plantes originaires de son continent d’origine. « Et on a du kinkéliba, qu’on appelle la citronnelle africaine. On est vraiment les seuls à l’avoir ici », explique l’agriculteur urbain.
Hamidou cultive également plusieurs variétés d’arachides et du moringa, sans parler du baobab. « Je ne connais personne qui fait pousser des baobabs à Montréal », dit-il. Sa production d’épinard égyptien, aussi appelé mouloukhiya, est d’ailleurs prisée. « C’est une plante cultivée un peu partout en Afrique de l’Ouest et en Afrique du Nord. Elle est très proche du lalo, que les Haïtiens utilisent. Les gens sont super contents de la trouver à l’état frais », souligne Hamidou.
Comme le climat québécois est beaucoup plus froid que celui du continent africain, certaines variétés ne peuvent pousser ici. « Les arbres fruitiers, c’est quasiment impossible. Parce qu’avant de pouvoir générer des fruits, c’est quand même assez long. Et si tu mets l’arbre à l’extérieur et qu’il gèle après quatre mois et que tu dois recommencer chaque année, ça n’en vaut pas la peine », indique-t-il. Certains légumes racines comme le taro et l’igname ont des cycles de production trop longs pour la saison estivale, ajoute Hamidou.
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Des légumes… et une clientèle variés
La soixantaine de variétés cultivées par Hamidou et son équipe réussissent à toucher une clientèle tout aussi hétéroclite. Certaines personnes proviennent de la communauté afrodescendante et souhaitent trouver des légumes proches de leurs traditions culinaires, explique Hamidou. « Il y a aussi beaucoup de curieux. Des Québécois qui ont voyagé et qui cherchent un ingrédient particulier pour reproduire le plat qu’ils ont mangé à l’étranger. »
Il calcule que les personnes non africaines correspondent d’ailleurs à plus de la moitié de sa clientèle. « Les Montréalais sont de manière générale quand même ouverts sur beaucoup de cultures. Il y a beaucoup de mets dont les gens ont déjà entendu parler et qu’ils veulent faire ici », rapporte-t-il. Les légumes d’Hamidou attirent aussi les adeptes d’alimentation végétarienne ou végétalienne qui désirent ajouter de la variété dans leur assiette.
L’été, Hamidou et son équipe vendent leurs produits dans plusieurs marchés de la métropole. L’hiver, ils approvisionnent davantage les restaurateurs, qui font également partie de la clientèle.
Le Montréalais d’adoption fait pousser des transplants et produit des semences que l’on peut se procurer via son site Web, et il encourage consommateurs et consommatrices à s’initier à l’agriculture urbaine. En partenariat avec l’Université Concordia, Hamidou donne d’ailleurs des ateliers pour apprendre à faire pousser des variétés ethniques, marginales et anciennes de fruits et légumes biologiques.
« On sensibilise les gens à cultiver eux-mêmes leurs légumes. On les conscientise à l’idée de ne pas utiliser toutes sortes d’intrants ou de pesticides chimiques nocifs pour la santé et pour la préservation de la vie du sol et de toute la biodiversité qui permet à la planète d’être plus résiliente », ajoute-t-il.
À l’avenir, Hamidou souhaite d’ailleurs produire encore plus de semences afin de rendre accessible l’agriculture urbaine à une plus grande partie de la population québécoise. Selon lui, le fait de produire des légumes à l’échelle locale et apprendre aux gens à en faire pousser est une forme de contribution à la cause climatique. « Je pense que produire le maximum de choses chez nous ou à proximité, c’est l’avenir. »