Cultiver l’imparfait, la mission des Nouveaux Voisins

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Philippe Asselin, et Émile Forest, cofondateurs de Nouveaux Voisins. ©Antoine Proulx
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Si je vous demande d’imaginer la cour d’une maison bien entretenue, vous aurez probablement en tête une pelouse manucurée, bien verte et taillée à la perfection. Cette vision de l’aménagement paysager, vestige de l’American Dream, s’est cristallisée dans l’imaginaire collectif au fil du temps. Une jeune organisation montréalaise est convaincue qu’il existe beaucoup mieux pour l’environnement.

Les mains d’Émile Forest et de Philippe Asselin ne mentent pas. Couvertes de terre et d’égratignures, elles évoquent tout le travail qu’il y a derrière Nouveaux Voisins. Les cerveaux du projet sont deux anciens punks qui ont troqué leurs instruments de musique pour des outils de jardinage. Dans les deux cas, la culture marginale n’est jamais loin.  

« Ne fais pas le saut, je suis un peu sale, j’étais sur un chantier ce matin », m’avertit Émile Forest avant notre rencontre tout près de leurs bureaux du Plateau Mont-Royal. 

L’organisme à but non lucratif est né en 2019 quand Émile, formé en urbanisme, et Philippe, architecte paysagiste, ont décidé de réunir leurs expertises respectives. Leur objectif : changer la vision répandue de l’aménagement paysager en alliant le beau et l’utile.  

« On a aménagé nos paysages habités de la même manière depuis toujours ou presque, avec les mêmes arbres, le même gazon, rappelle Émile. On a créé des déserts de biodiversité. Mais la réalité, c’est qu’il existe des options beaucoup plus bénéfiques pour la nature! » 

©Antoine Proulx

Des jardins sauvages… et utiles

Nouveaux Voisins offrent des services d’architecture et d’aménagement paysager qui s’inspirent d’une multitude d’approches écologiques. Une manière de donner un coup de pouce à la biodiversité en utilisant les espaces habités qui nous entourent.  

« Notre mission est de régénérer la relation entre les humains et l’ensemble du vivant, on fait ça à travers de l’expérimentation horticole », ajoute-t-il.  

Concrètement, cela se traduit entre autres par la plantation d’espèces dites « indigènes ». Celles-ci, en plus d’être adaptées aux conditions locales, ont une grande valeur écologique. Elles fournissent notamment un habitat et de la nourriture à bon nombre d’oiseaux et d’insectes. 

Un des projets de Nouveaux Voisins : les jardins expérimentaux du Campus de la transition écologique à Montréal. ©Émile Forest


Pour Émile, le règne de la pelouse et l’obsession du
« tapis vert » est un peu symptomatique de cette déconnexion avec la nature. Et rappelons qu’il n’y a pas si longtemps, c’était monnaie courante d’asperger son gazon de pesticides lorsqu’un ou deux pissenlits se pointaient le pédoncule.  

« Cette manière daménager sans trop se poser de questions fait partie de la rupture entre l’humain et la nature, soutient Émile, originaire de Rimouski. Comme toute relation dans la vie, amoureuse ou d’amitié, c’est bien difficile de prendre soin de l’autre si tu ne fais pas d’efforts pour le comprendre. C’est pour ça qu’on veut informer les gens pour qu’ils puissent passer à l’action. » 

On ne veut pas que les gens qui ont une pelouse se sentent cheap, c’est important pour nous. On est plutôt dans un discours regardez le paysage qu’on pourrait faire ensemble. Si tout le monde fait ce petit effort avec son terrain, c’est là qu’on va avoir un impact. On va avoir des territoires riches en diversité.

Émile Forest, cofondateur de Nouveaux Voisins

Petit lexique pour y voir plus clair 

  • Plante indigène : une plante qui était déjà là, soit une plante sauvage, une fleur, un arbre ou un arbuste qui a poussé naturellement dans un milieu donné et s’y est développé sans l’aide ni l’intervention de personne (ecovegetal.com). 
  • Services écosystémiques : l’ensemble des avantages que les écosystèmes procurent aux humains afin qu’ils et elles puissent se développer et vivre; ces avantages peuvent être perçus sous la forme de valeurs (service culturel), de biens (service d’approvisionnement) ou de services (service de régulation).  

Les territoires habités comme champs d’action 

Pour Nouveaux Voisins, l’été est une période chargée pendant laquelle sont mis à exécution les plans d’aménagement imaginés durant l’hiver (la recherche occupe une grande place dans le projet). Les idées prennent vie, pour le plus grand plaisir des deux complices, unis dans le travail comme en amitié. 

« Je suis chanceux que mon partenaire professionnel soit aussi un de mes bons amis, ça simplifie beaucoup de choses, on se comprend vraiment bien », me lance Émile en parlant de son acolyte, rencontré lors d’études en sociologie de l’environnement.  

 
Émile Forest participe à tous les projets de plantation sur le terrain. ©Jonathan Lapalme


De la grande région de Montréal au Bas
du-Fleuve, les projets ne manquent pas. Que ce soit pour des résidences privées ou des municipalités, la vision des Nouveaux Voisins convainc de plus en plus de monde. Les contrats qu’ils obtiennent leur offrent l’occasion rêvée d’expérimenter des approches qui s’inscrivent dans le mouvement de la transition socioécologique.
 

« Il faut enrichir nos milieux habités, explique-t-il. On essaie de tester des manières de faire ça. À travers ces tests, nos échecs et nos réussites, on veut partager nos apprentissages avec le plus large public possible pour que les gens passent à l’action. » 

©Antoine Proulx


Et, selon Émile Forest, le grand public est très ouvert au changement, mais encore mal informé quant à ce qu’il peut faire à l’échelle individuelle.  
 

« Il y a beaucoup de citoyennes et de citoyens qui disent “moi, j’aimerais en faire plus, mais quoi?”. Le plus grand défi est de les rassembler à travers cette vision-là, une vision de territoires habités plus riches, plus diversifiés et plus autonomes. C’est beaucoup de vulgarisation, parce que, concrètement, il n’y a personne contre ça, c’est comme de la vertu. » 

Dans la lutte contre les changements climatiques, tous les champs d’action sont importants à cultiver. Pour Nouveaux Voisins, celui du territoire habité, trop longtemps vu sous l’angle de la possession matérielle, représente un terreau fertile pour retisser des liens entre l’humain et la nature. 

« On n’a pas de solution miracle à la crise climatique, mais on est certains que c’est un bon début, avance Émile. Il n’y a rien de plus fort que de prendre une plante, de la faire goûter à quelqu’un, de la faire planter à quelqu’un. Le lien avec cette plante devient tellement fort, tu as envie de la chérir et de la protéger. » 

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