La construction d’unités d’habitation accessoires dans les arrière-cours est désormais autorisée par quelques villes au Québec pour freiner l’étalement urbain. À Sainte-Catherine, un entrepreneur y voit une solution pour loger ses employés.
José Abraham Torres a passé toute sa vie à Sainte-Catherine, sur la Rive-Sud dans la région de Montréal, où plusieurs membres de sa famille résident toujours. Lorsqu’il a appris que la municipalité de Sainte-Catherine autorisait désormais la construction d’unités d’habitation accessoires (UHA) dans la cour d’une propriété déjà existante, l’entrepreneur a saisi la balle au bond. Son idée ? Construire une minimaison sur le terrain de sa mère, situé à un jet de pierre du sien.
« Au départ, je voulais y héberger mon frère », explique-t-il. Mais la vocation de l’habitation a progressivement changé et l’entrepreneur envisage désormais de s’en servir pour de futurs employés de son entreprise.
José Abraham Torres est né et a grandi à Sainte-Catherine. Il est gérant de Maison Granite, une division de l’entreprise de comptoirs King Granite, fondée par son père après son arrivée au Québec en provenance du Honduras il y a plus de quarante ans. Or, Maison Granite est située à Saint-Rémi, à une vingtaine de minutes en voiture de Sainte-Catherine. Le problème ? « Nos employés vivent souvent dans des quartiers où habitent les communautés latinas, à Montréal-Nord ou à Anjou… Pour venir en auto jusqu’à Saint-Rémi, il leur faut parfois deux heures à l’aller et trois heures au retour », déplore-t-il.
Le temps de déplacement est tel qu’un ex-employé a démissionné après une semaine seulement. Une autre a tenu deux mois, avant finalement d’emménager à Saint-Constant, ville voisine de Sainte-Catherine.
Une solution à la crise du logement et bien plus
La minimaison de José Abraham Torres, présentement à l’étape de la conception (plans et budget), servirait donc à attirer et à retenir de la main-d’oeuvre. Comme lui, plus de 20 ménages sainte-catherinois ont enclenché des démarches pour bâtir une minimaison, ajouter un demi-sous-sol ou une annexe à leur résidence principale, qui sont quelques-unes des options permises par le règlement de Sainte-Catherine adopté en janvier 2022.
Ce type de logement vient avec de nombreux bénéfices, détaille Marie-Josée Halpin, directrice générale de la Ville de Sainte-Catherine. « Il y a plus d’entraide et de partage liés à l’entretien du terrain, par exemple. Souvent, il n’y aura qu’un jardin, qu’une piscine, qu’un espace de stationnement », énumère-t-elle. Dans certains secteurs où la population est vieillissante, les UHA favorisent en outre une mixité intergénérationnelle.
S’ajoutent également des avantages financiers : lorsque l’habitation principale et l’UHA appartiennent au même propriétaire, le logement accessoire peut alors « faciliter l’accès à la propriété » en ajoutant un potentiel revenu locatif, note Marie-Josée Halpin. Ce revenu supplémentaire pourrait, par exemple, aider une jeune famille à obtenir son prêt hypothécaire.
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Outil de densification douce
Pour les municipalités, les UHA constituent une stratégie de densification douce (ajouter des logements dans un quartier déjà développé) permettant de freiner l’étalement urbain. Plusieurs villes québécoises pensent à s’engager dans la voie des UHA ou lancent des projets pilotes, comme à Laval et à Longueuil. Ailleurs au Canada, ces unités font depuis quelques années partie du paysage urbain de certaines villes comme Vancouver, Calgary ou Ottawa.
À Sainte-Catherine, même si la pandémie de COVID-19 et l’augmentation des coûts associés à la construction ont mis sur pause plusieurs projets d’UHA, la machine est bien lancée. « Parce qu’elles sont bâties sur des terrains existants, ces logements optimisent les infrastructures de la ville, comme le transport public ou les espaces verts, analyse Marie-Josée Halpin. Les quartiers sont utilisés pour ce qu’ils ont déjà à offrir, et non construits de zéro. »
Le projet de la famille Torres — loger des employés — demeure cependant une exception. Accueillir un membre de la famille dans l’UHA est le motif que la directrice générale de la Ville entend le plus souvent de la part des familles intéressées par ce type de logement.
La minimaison de l’entrepreneur pourrait accueillir « deux personnes, voire une petite famille ». Par le passé, la mère de José Abraham Torres a même déjà hébergé des employés de l’entreprise de son fils dans sa propre maison. « Mais si c’est dans une minimaison au fond de sa cour, ce sera encore mieux », se réjouit ce dernier.
Cet article provient d’un cahier spécial Immobilier publié par le quotidien Le Devoir.