Moins de GES en sortie d’usine

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Retombées positives générales

Tous secteurs d’activités confondus, les industries québécoises ont grosso modo deux avenues pour réduire leur empreinte carbone : réduire leur consommation d’énergies fossiles ou revoir leurs procédés de fabrication. La première option est la plus évidente et la plus facile.

Lorsqu’une usine s’agrandit, ses émissions de gaz à effet de serre (GES) grandissent aussi. À Joliette, Bridgestone a déjoué cette évidence. En même temps qu’il annonçait en 2016 la construction d’un nouvel entrepôt de 200 000 p2, le fabricant de pneus japonais lançait un autre chantier : l’automatisation de son système de chauffage, de ventilation et de conditionnement de l’air, avec pour cible sa consommation de gaz naturel, qui représente la moitié des émissions de GES de l’usine.

Des employés de Bridgestone.

« Sans ce projet, nos émissions reliées au chauffage auraient augmenté de 26 %, signale la cheffe environnement de l’usine, France Veillette. On ne dépense pas plus en gaz naturel, malgré l’agrandissement, parce qu’on améliore l’efficacité. » Car en plus, un projet de récupération de chaleur a été mis sur pied dans le bâtiment. Ces dernières années, l’entreprise a aussi réduit de moitié sa consommation d’eau, elle recycle 100 % de ses déchets industriels et vise désormais la norme internationale ISO 50 001 en gestion durable de l’énergie, une certification accessible au Québec depuis l’an dernier. Pour la décrocher, elle doit s’engager dans un processus d’amélioration continue.

1,1 milliard de dollars: c’est la somme que Québec prévoit investir d’ici 2026 pour accompagner le secteur industriel dans sa décarbonisation.

 

« Il faut un cadre pour s’assurer de toujours avoir des gains », souligne Johanne Whitmore, chercheuse principale à la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal. Dans ses études, elle a en effet constaté que les bénéfices s’effritent souvent avec le temps, en raison notamment de l’effet rebond. Une usine se sert parfois des économies de l’efficacité énergétique pour augmenter sa production, au point d’annuler ses efforts pour réduire sa consommation.

Changer ses habitudes

Résultat, si les émissions de GES liées à l’énergie dans le secteur industriel ont diminué de 20 % au Québec entre 1990 et 2017, c’est en raison de la fermeture d’usines. En excluant le domaine des pâtes et papiers, dans lequel plusieurs installations ont cessé leurs activités, la baisse n’est plus que de 2 %. Alors comment faire pour réduire à long terme les émissions de l’industrie québécoise, aujourd’hui responsable de 44 % des GES de la province ? « C’est comme quand tu décides d’arrêter de fumer : il faut mettre des stratégies pour modifier tes habitudes, tes comportements », illustre Johanne Whitmore.

En la matière, Kruger se distingue. En novembre 2019, son usine de papier mouchoir de Gatineau est devenue la première à recevoir la certification ISO 50 001 par le Bureau de normalisation du Québec. Depuis 2015, elle émet 3000 tonnes d’équivalent CO2 en moins par an. C’est comme si elle retirait 700 voitures à essence des routes. Son secret ? L’entreprise met à contribution les gens les mieux placés pour déceler les gaspillages d’énergie : les travailleurs.

usine kruger action climatique
Chez Kruger, ce sont les employés qui mettent la main à la pâte. (courtoisie)
usine kruger action climatique
Ils peuvent suivre en temps réel l'énergie qu'ils consomment. (courtoisie)

Formés, sensibilisés et accompagnés, ces derniers peuvent voir la consommation énergétique en temps réel. « Ça devient beaucoup plus tangible pour eux », indique Maxime Cossette, vice-président développement durable et biomatériaux de Kruger, qui constate une saine compétition entre les départements. Que ceux qui maintiennent la qualité de la production avec le moins d’énergie gagnent !

Économie circulaire

Parmi ses recommandations, Johanne Whitmore encourage les entreprises à cartographier l’ensemble de leurs opérations, en détaillant tout ce qui entre et sort. En récupérant certains de leurs rejets ou résidus, elles peuvent limiter leurs besoins en ressources dont l’extraction génère des GES.

C’est ce qu’a réussi l’usine de chocolat Barry-Callebaut de Saint-Hyacinthe. Deux chaudières de production de vapeur au gaz naturel arrivaient en fin de vie. Plutôt que de les remplacer, l’entreprise s’est tournée vers un de ses rebuts : les écales de cacao. Avec l’aide de la firme montréalaise Ecosystem, spécialisée dans l’élimination du gaspillage énergétique, elle a implanté une chaudière à biomasse, différente de celle utilisée pour la biomasse forestière, qui permet de brûler les écales.

On a amélioré la vitesse de certains équipements avec la vapeur supplémentaire d’une façon qui se fait nulle part ailleurs.

Expérimenter avec ce nouvel équipement, le stabiliser et l’optimiser s’est révélé bien plus compliqué que simplement remplacer un appareil. « Mais on voulait le faire pour les économies en argent et en émissions de CO2 », signale Jocelyn Morin, directeur maintenance et ingénierie chez Barry-Callebaut Canada. Pari réussi ! Non seulement la facture de gaz a chuté de 200 000 $ par an, mais les émissions annuelles de GES ont, elles, diminué de 2300 tonnes d’équivalent CO2 et on a évité au passage l’enfouissement de 2800 tonnes d’écales de cacao. De plus, comme cette chaudière dégage plus de vapeur, elle a permis d’autres innovations dans la production. « On a amélioré la vitesse de certains équipements avec la vapeur supplémentaire d’une façon qui se fait nulle part ailleurs », se réjouit Jocelyn Morin.

L’usine de Barry-Callebaut, à Saint-Hyacinthe (courtoisie)
La fameuse chaudière qui brûle les écales de cacao. (courtoisie)

« En matière de récupération énergétique, les technologies sont matures, souligne Julien Beaulieu, chercheur au Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTEI). Mais au niveau des émissions qui ne viennent pas de l’énergie, il y a encore de la recherche et du développement à faire. » Or près de la moitié des GES du secteur industriel sont liés aux procédés, notamment dans les secteurs de l’aluminium, du ciment, de l’agriculture ou de la gestion des déchets, et ils nécessitent des solutions au cas par cas. Le CTTEI travaille, par exemple, sur un substitut de béton formé à partir de nouvelles composantes, entre autres des résidus industriels, dont la fabrication s’effectuerait à moins de 700 degrés Celsius, contre 1500 pour le béton traditionnel, ce qui réduirait considérablement les émissions de GES. « Ce sont des changements de procédés qu’il faut explorer, continue le titulaire de la chaire de recherche collégiale sur l’écologie industrielle et territoriale gérée par le Cégep de Sorel-Tracy. Il faut donc changer nos manières de produire. » Et repenser ce qui sort de l’usine.

Cet article provient d’un cahier sur les entreprises d’ici qui passent à l’action climatique, publié par le quotidien Le Devoir, en partenariat avec Unpointcinq.