Premier fonctionnaire du monde municipal à devenir directeur du développement durable en 2010, Alain Desjardins est une figure de proue dans l’action en changements climatiques. Aujourd’hui directeur général de la ville de Plessisville, il innove pour préparer la municipalité au défi climatique.
En 2013, le premier geste qu’Alain Desjardins a posé pour les résidents a été la création d’un fonds vert qui donnerait à la municipalité les moyens de ses ambitions : financer des projets durables pour améliorer la qualité de vie des générations présentes et futures. Plus d’un million de dollars a jusqu’ici été amassé, ce qui représente une somme de 125 $ par habitant.
Des idées de projets pour améliorer la qualité de vie des citoyens et de l’environnement, Alain Desjardins en a tout plein. Comme de remplacer le mazout des bâtiments municipaux pour de l’alimentation électrique. Également, de former une flotte municipale de véhicules carboneutres, dont les camionnettes et les autobus scolaires, d’ici quelques années. Fier «papi» de 10 petits-enfants, l’homme aime aussi s’inspirer d’idées puisées ailleurs. Si bien qu’il nous confie adorer fouiner sur le web à la recherche d’actions intéressantes initiées par d’autres villes du monde, des endroits qu’il se plait à visiter durant ses vacances annuelles.Un élève qui se distingue
Depuis 2015, le directeur général a engagé Plessisville comme membre du programme Partenaires dans la protection du climat (PPC) de la Fédération canadienne des municipalités (FCM), qui vise la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) au pays.Leader en la matière, Plessisville est devenue l’année suivante (2016) la première municipalité québécoise à franchir les cinq étapes imposées, de l’inventaire des GES à la présentation des résultats. Cette année, l’objectif de 15 % de réduction de GES a été atteint.
En 2014, les émissions de la ville étaient de 377 tonnes éq. CO2. Preuve à l’appui, Alain Desjardins démontre que passer aux actes pour réduire les GES est rentable : un coût de revient d’environ 6 000 $, soit moins d’un dollar par citoyen.
Dire que Plessisville se distingue au Québec dans la lutte contre les changements climatiques est aujourd’hui un euphémisme. Dès 2015, l’administration s’est dotée d’un ambitieux Plan stratégique 2015-2025 comprenant pas moins de 124 actions qui touchent directement l’environnement et la notion de ville intelligente. Des efforts qui ne sont d’ailleurs pas passés inaperçus. En septembre dernier, l’auteur Marie-Claire Dumont, coordonnatrice du secteur Air et Changements climatiques et conseillère Partenaires dans la protection du climat au Québec, consortium AQME et Réseau Environnement, consacrait deux pages fort élogieuses à la petite municipalité des Bois-Francs dans le magazine spécialisé Vecteur Environnement.
«Voici les initiatives mises en place par la Ville pour lui permettre de réduire ses émissions de GES : Système d’autopartage avec véhicule électrique en région (SAUVéR), Financement innovateur pour des municipalités efficaces (FIME), Programme de leadership en gestion des actifs de la FCM, installation de quatre bornes de recharge électrique, Plan de mobilité active, conversion de l’éclairage public aux DEL, élimination du diésel, remplacement du chauffage au pétrole par le gaz naturel à la bibliothèque et à l’hôtel de ville (et bientôt dans tous ses autres bâtiments)», lit-on dans la publication.
Alain Desjardins croit profondément au pouvoir des petits gestes, une philosophie qui le guide chaque jour dans ses actions. Il aime se projeter dans 20 ans en pensant que les politiques qu’il met en place aujourd’hui auront des effets positifs à long terme. Instaurer de pareilles mesures reste malgré tout un défi quotidien, spécialement quand on le fait avec de l’argent public.
Je dois convaincre les élus et leur prouver que cela est rentable pour la collectivité. Plusieurs générations se côtoient avec leur mentalité distincte. L’important est de les réunir autour de solutions gagnantes.
Avant de réaliser des projets d’urbanisme, le DG estime important de se rendre sur le terrain pour écouter les résidents. Sa motivation et sa vision le conduisent à consulter les aînés pour comprendre leurs réels besoins de déplacement et pour adapter les aménagements en ce sens.
Apprendre du passé
Mais où cet homme puise-t-il une telle volonté d’action sur le plan municipal? Le passé est riche d’enseignement. Et de leçons.
Alors qu’il était maire de Mercier en 1993, un événement l’a profondément marqué : la contamination des eaux souterraines des lagunes de Mercier, une catastrophe écologique majeure. «J’ai pris conscience de l’impact des décisions prises 20 ans plus tôt dans les années 1970 sur les générations futures. C’est pourquoi je me suis engagé à laisser aux citoyens un environnement sain.»
Membre du conseil d’administration de l’Association québécoise pour la maîtrise de l’énergie (AQME), il estime qu’il y a encore trop de gaspillage d’énergie dans le parc immobilier. Il entend donc promouvoir la rénovation écoénergétique pour que les citoyens économisent de l’énergie, et de l’argent, pour longtemps. Avec le projet-pilote Financement innovateur pour des municipalités efficaces (FIME) de l’AQME, des prêts sont accordés à même la taxe foncière, bonifiant ainsi la valeur de la propriété tout en rendant la rénovation écoénergétique abordable.
Malgré son statut de vétéran du monde municipal et les décennies qui l’accompagnent, Alain Desjardins carbure à l’innovation… et pas seulement technologique, mais surtout celle destinée à améliorer la qualité de vie des citoyens. Le projet d’un futur écoquartier au centre-ville de Plessisville lui tient d’ailleurs énormément à cœur. Et rien ne semble pouvoir freiner son élan, pas même le déplacement d’une cimenterie de 300 000 pieds carrés vers un parc industriel, loin des aires résidentielles.
Les 80 logements ne visent rien de moins que l’autonomie énergétique. « Le défi que je lance aux ingénieurs est d’arriver à un coût énergétique de 500 $ de moins par année que celui des logements standards, et ça, c’est une réelle économie pour le contribuable. »
Passer à l’action en matière de réduction des GES est tout aussi motivant pour une petite municipalité qu’une grande métropole. Déjà, grâce aux multiples projets instaurés, Plessisville est bien partie pour atteindre ses objectifs de réduction de GES d’ici 2020. Au niveau corporatif, la réduction est déjà de 13,3 % sur un objectif de 20 %, et de 5,1 % sur un objectif de 10 % au niveau collectif (Ville de Plessisville, 2016).
Parmi les nouveaux projets qui marqueront 2018, l’administration veut s’attaquer aux rejets industriels, améliorer le transport en commun et convertir sa flotte de camions municipaux en véhicules électriques.
Aux dires du DG «super-héros», la qualité de vie associée à des politiques de développement durable sert aussi à tisser des liens plus serrés. Un aspect qui ne se mesure pas en chiffres ou en dollars, mais qui vaut assurément son pesant d’or. Allez voir par vous-mêmes à Plessisville!