La nouvelle tendance en Gaspésie : aménager des sentiers de randonnée avec du verre récupéré pour un effet stroboscopique.
Adieu la garnotte! Dans une section du parcours lumineux Nova Lumina, situé en bord de mer à Chandler, on a remplacé les petits cailloux grisâtres qui recouvrent habituellement les sentiers par un tapis de verre concassé. Non seulement aucun touriste en gougounes n’a souffert de lacération cet été, mais en plus, ils ont profité d’une expérience rehaussée par ce revêtement de sol nouveau genre. Un projet pilote qui pourrait faire école.
« L’effet est saisissant, car les granules de verre reflètent les rayons laser », explique Émilie Bourque-Bélanger, directrice de cette attraction touristique gaspésienne conçue par la firme Moment Factory. Mais le revêtement présente aussi d’autres avantages pour les visiteurs. « Le verre est plus silencieux et plus doux pour les pieds que le gravier », poursuit-elle. Des atouts qui ne sont pas insignifiants lorsqu’on offre un spectacle immersif à la Nova Lumina.Note parfaite
Depuis le début de l’été, on craque pour le verre récupéré en Gaspésie. On l’utilise comme paillis dans les aménagements paysagers urbains, comme matériel de remblai dans les travaux d’aqueduc et comme alternative au gravier dans les sentiers pédestres. Mais ceux qui craignent les coupures peuvent se rassurer. Même si on ne le recommande pas, il paraît que l’on peut marcher pieds nus sur ces morceaux de verre. Que les fakirs ne tentent pas de nous en passer une bonne!Cet engouement provient de l’expérimentation d’un nouveau procédé de traitement du verre issu de la collecte sélective. Depuis juin, la Régie intermunicipale de traitement des matières résiduelles de la Gaspésie (RITMRG), située à Grande-Rivière, met en place de nouveaux équipements permettant de recycler 99 % du verre.
Le système comprend une ligne d’alimentation capable de trier les rejets des convoyeurs, dont ces petits morceaux de verre qui se ramassent sous les rouleaux, et un « imploseur », une innovation technologique qui broie bouteilles de vin, pots de confiture et autres contenants de verre en granules de 0 à 6 mm (qu’on utilise pour les sentiers) ou de 6 à 25 mm (qu’on utilise pour des projets plus artistiques, comme la conception de bancs ou de lanternes).
On collecte, on transforme et on réutilise désormais 100 % de cet écoproduit sur place plutôt que de l’envoyer par camion jusqu’à Montréal, ce qui a pour effet de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Bête noire
Qui plus est, on épargne des sous. Depuis des années, le recyclage du verre constitue la bête noire des centres de tri au Québec. Cette matière résiduelle n’a aucune valeur marchande et, en plus, elle contamine les autres matières comme le papier lorsqu’elle se brise en morceaux dans le bac vert qui la transporte jusqu’aux convoyeurs.
« Auparavant, on devait payer de 25 à 30 dollars la tonne pour faire recycler cette matière résiduelle, tout en déboursant jusqu’à 4 000 $ par année en frais de camionnage pour la transporter », explique Nathalie Drapeau. Au final, ce projet pilote engendre des économies récurrentes de 60 000 à 80 000 dollars par année, permettant notamment de réduire les coûts associés à l’enfouissement d’une partie du verre que l’on devait faire jusqu’à tout récemment. Avec un tel projet, la RITMRG aspire à trier les déchets de toute la MRC du Rocher-Percé, de la ville de Gaspé et de Murdochville, qui regroupent 25 000 habitants.
Ce projet s’inscrit dans le plan panquébécois de revalorisation du verre, mis en place par Éco Entreprises Québec (ÉEQ). Quatre autres centres de tri de la province y participent. Ils traitent ensemble près du quart de tous les contenants de verre que les Québécois placent dans leur bac de récupération. À terme, ÉEQ vise à recycler la totalité du verre issu de la collecte sélective.
Le verre en aménagement paysager, c’est la tendance de futur.