
Chaque année, des milliers de tonnes de matériaux de construction encore utilisables sont envoyées à l’enfouissement au Québec. Face à ce dur constat, les frères Alexandre et Maxime Potvin ont décidé d’agir en créant une plateforme qui donne une seconde vie à ces précieuses ressources.
Selon Recyc-Québec, le secteur de la construction, de la rénovation et de la démolition (CRD) a généré 3 512 000 tonnes de résidus en 2021, dont 47 % se sont retrouvés sur un site d’enfouissement, sans avoir été préalablement triés, excluant ainsi toute possibilité de réemploi ou de valorisation.
Les matériaux excédentaires qui restent après un chantier « sont souvent entreposés pendant des mois, voire des années, dans des espaces qui finissent par devenir encombrés. Quand le ménage est fait, ces matériaux finissent généralement à l’enfouissement », explique Alexandre Potvin.
Pour remédier à ce gaspillage, les frères, qui sont à la tête de Groupe MPotvin qui comprend une compagnie d’excavation et de gestion immobilière, ont lancé Twenifor en 2023, une plateforme numérique de revente de matériaux pour les entreprises.
On veut être le Facebook Marketplace de la construction, ajoute l’aîné de la fratrie. L’objectif est de faciliter au maximum la transaction, ce qui évite les pertes et permet une meilleure gestion des surplus.
Un Marketplace du bâtiment
Le fonctionnement est simple : les entrepreneurs et entrepreneuses inscrivent leurs matériaux inutilisés sur la plateforme, qui les met en relation avec des acheteurs potentiels. Twenifor facture des frais de transaction de 2 % à 15 %, selon l’abonnement mensuel choisi et le montant total de la vente.
« On veut être le Facebook Marketplace de la construction, ajoute l’aîné de la fratrie. L’objectif est de faciliter au maximum la transaction, ce qui évite les pertes et permet une meilleure gestion des surplus. »
Afin d’optimiser le processus, Twenifor offre également d’installer des conteneurs directement sur les chantiers, permettant aux travailleurs et travailleuses de stocker facilement les matériaux destinés à la revente.
« Les entreprises utilisaient déjà des conteneurs pour leurs déchets. Pourquoi ne pas en avoir un pour la revalorisation ? C’est un service clé en main, le tri peut se faire directement sur place », souligne Alexandre Potvin.
Depuis le lancement de la plateforme, près de 150 entreprises ont créé un compte. L’équipe a aussi conclu des partenariats importants, dont un avec le géant de l’aluminium Rio Tinto.
« On concentre nos activités sur les entrepreneurs et les compagnies, c’est vraiment là qu’il y a un besoin, assure Maxime Potvin. Pour ce qui est des particuliers, on laisse ça aux plateformes déjà en place, comme Marketplace et Kijiji. »
La jeune PME québécoise a réussi son plus gros coup en mars 2024. Un pont en acier de 75 pieds, pesant près de 80 tonnes, a été vendu sur sa plateforme et livré à l’acquéreur, un entrepreneur de Chibougamau, dans le Nord-du-Québec.
Des racines autochtones
Au-delà de leur engagement environnemental, les frères Potvin portent également un héritage autochtone dont ils sont fiers. Leur mère est originaire de Mashteuiatsh, une communauté innue du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Pour eux, cet enracinement est une source d’inspiration.
« On voulait aussi montrer qu’il est possible d’être des entrepreneurs autochtones prospères et de redonner à nos communautés », affirme le benjamin.
Le siège social de la PME est installé dans la communauté, une manière pour la famille de s’ancrer dans son identité et d’offrir des possibilités d’emploi local.
Si Twenifor s’impose déjà comme un acteur clé de la revalorisation des matériaux au Québec, les frères Potvin débordent d’ambition et ne comptent pas s’arrêter là.
« On veut démontrer qu’un modèle d’affaires basé sur la responsabilité sociale et environnementale est viable à grande échelle. Notre but, c’est de devenir les plus grands entrepreneurs autochtones au pays », conclut Maxime Potvin avec un sourire fier.
Cet article provient du cahier spécial “Immobilier” publié par le quotidien Le Devoir.