Latte avoine, cappuccino, americano, en se levant, en marchant, au travail, entre potes… Le café fait partie de notre quotidien. Souvent, on le boit dans des tasses à usage unique, mais combien en jette-t-on à la poubelle chaque année?
196. C’est le nombre de cafés que j’ai consommés à l’extérieur de chez moi d’avril 2023 à avril 2024. Cela inclut les cafés bus dans de la vaisselle en céramique – 59 pour être précise –, car je prends quand même parfois le temps de savourer le délicieux nectar assise à une table. J’en ai dégusté 118 autres dans ma tasse réutilisable. J’ai donc évité d’envoyer 118 gobelets à l’enfouissement, au recyclage ou au compostage en une année.
Réduire les déchets à la source fait partie de mon quotidien : je réutilise les baguettes chinoises, je conserve les enveloppes et courriers reçus par la poste pour en faire du papier brouillon, et je me sers d’une tasse réutilisable, aussi appelée tasse « de voyage ».
Mais à quel point ma tasse de voyage est-elle utilisée? C’est ce que je voulais savoir. C’est pourquoi, pendant une année, j’ai noté chaque café acheté. Premier constat : je dépense beaucoup trop d’argent en café chaque année. Deuxième constat : je réalise qu’avoir une tasse réutilisable n’empêche pas l’usage de tasses jetables, car parfois, eh bien oui, on l’oublie! Mais dans l’ensemble, ça évite beaucoup de déchets.
Une tasse réutilisable vaut-elle mieux qu’une tasse jetable?
Je suis pas mal fière d’avoir fait l’inventaire assidu de ma consommation, tout en trimbalant ma tasse partout où j’allais. Mais je me demande tout de même à partir de combien de cafés (ou autres boissons, soyons inclusifs) l’impact du cycle de vie de ma tasse réutilisable est amorti?
D’après un article du média anglais The Guardian, un gobelet réutilisable doit servir de 20 à 100 fois pour compenser les émissions produites lors de sa fabrication. Si on se réfère à ma propre consommation, j’ai atteint cet objectif avec les 118 cafés bus dans ma tasse personnelle.
Une étude du CIRAIG et de RECYC-Québec réalisée en 2014 indique que la tasse en céramique que l’on trouve dans les restaurants et cafés représente la meilleure option. Elle est suivie par la tasse de voyage, qu’elle soit en plastique (polycarbonate ou polypropylène) ou en acier inoxydable. Et en dernière position figure le gobelet jetable en carton. L’étude tient compte d’une production locale (600 km) pour les contenants à usage unique, et d’une production en Chine pour les tasses de voyage et en céramique.
Sans grande surprise, les valeurs quantitatives – c’est-à-dire l’empreinte de chaque scénario – doivent être mises à jour avec des données plus récentes, explique François Saunier,
directeur exécutif adjoint du Centre international de référence sur l’analyse du cycle de vie et la transition durable (CIRAIG), l’organisme à l’origine de l’étude qui date donc d’une dizaine d’années. Mais sur les principaux enseignements, pour lui, les résultats ne changent pas : « La tasse réutilisable reste une meilleure option que la tasse à usage unique. » Et ce, même si on recycle ou composte les récipients jetables, selon l’expert.
L’étude du CIRAIG se base sur 500 utilisations de la tasse en céramique ou réutilisable pour analyser le cycle de vie, ce qui peut sembler beaucoup. Si on se fie à mon expérience, j’aurais atteint ce seuil après un peu plus de quatre ans avec la même tasse. Toutefois, François Saunier indique qu’il suffit de 100 à 200 utilisations pour que ma tasse de voyage soit une meilleure solution.
L’un des autres impacts attribuables à la tasse de voyage est le lavage. Si les tasses en céramique des commerces sont lavées dans des lave-vaisselle qui optimisent l’utilisation de l’eau et du détergent, les tasses réutilisables nettoyées à la main, elles, peuvent nécessiter plus d’eau et de savon, ce qui augmente leur impact. Intéressant!
Enfin, l’étude ne tient pas compte du matériau utilisé. Par exemple, les microplastiques libérés par la tasse et qui peuvent ensuite se retrouver dans les océans ou même le corps humain ne sont pas pris en compte dans l’analyse du cycle de vie. Toutefois, des travaux sur le sujet sont en cours au CIRAIG : « Plusieurs de nos étudiants travaillent à intégrer ces données dans les indicateurs qu’on utilise. Ça peut effectivement influencer certaines conclusions », ajoute François Saunier.
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Et donc, on fait quoi?
Qui aurait cru qu’une question aussi simple que le choix du contenant pour boire son café nous amènerait à des réflexions aussi complexes? Je vais vous faire une confidence : je me suis déjà empêchée d’acheter un café parce que j’avais oublié ma tasse et que je ne voulais pas utiliser un gobelet jetable. Est-ce exagéré? Peut-être. Il y a certainement un juste milieu à trouver.
Au final, la tasse réutilisable s’avère une bonne solution. Si vous décidez de faire le pas, choisissez-la bien : optez pour des matériaux solides comme le métal, durables comme le verre ou recyclables comme le plastique de polypropylène. Privilégiez aussi une fabrication locale quand cela est possible, au Canada ou aux États-Unis plutôt qu’en Asie ou en Europe. Et surtout, pensez à l’apporter avec vous! Il faut que cela devienne un réflexe, comme la bouteille d’eau ou le cellulaire, qu’on oublie rarement…
Si vous ne voulez pas investir ou si vous savez d’avance que vous risquez de l’oublier, optez pour La tasse, un service de consigne : vous payez la tasse 5 $ avec votre café et vous la rendez quand vous le souhaitez dans les établissements partenaires. Surveillez également les endroits qui offrent un rabais aux clients et clientes qui apportent leur propre tasse; si vous êtes une grande consommatrice comme moi, vous pourriez faire de belles économies, et même compenser l’achat de votre gobelet réutilisable!
Pour conclure, je dirais que, comme toute pratique écoresponsable, il y a un équilibre à trouver. Changer ses habitudes peut prendre du temps, et ce n’est pas une raison pour se priver de café. J’essayerai à l’avenir de garder le sourire lorsque la barista me servira mon café par erreur dans un gobelet en carton, alors que j’avais apporté ma tasse. Il y a plus grave dans la vie!