Un logiciel pour augmenter la résilience devant le risque d’inondation

Hachem Agili © courtoisie
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Hachem Agili © courtoisie
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23 novembre 2022 - Leïla Jolin-Dahel, Journaliste de l'Initiative de journalisme local

Aider les organisations et la population à prévenir les risques liés aux inondations, c’est le mandat que s’est donné Geosapiens. Portrait d’une entreprise de chez nous qui désire limiter les dégâts et augmenter la résilience face aux changements climatiques.

Alors qu’il étudie en science de l’eau à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), Hachem Agili prend conscience de l’étendue des besoins des municipalités en matière de gestion de crise à la suite des inondations de 2011 à Saint-Jean-sur-Richelieu. « On a constaté qu’il y avait une vraie nécessité d’avoir des outils pour mieux gérer les inondations, mieux anticiper ce risque, mieux communiquer l’information aux citoyens », explique le PDG et cofondateur de Geosapiens, une entreprise née il y a cinq ans.

Avec son équipe, il développe alors la solution technologique E-Nundation qui a remporté le premier prix au défi AquaHacking en 2018. Cette reconnaissance permet à la jeune entreprise de démarrer réellement. Son logiciel modélise au moyen d’un algorithme l’impact des divers cours d’eau sur une région donnée ou pour une adresse précise.

E-NUNDATION, gagnant du premier prix au défi Aquahacking 2018 © Aquahacking
E-NUNDATION, gagnant du premier prix au défi Aquahacking 2018 © Aquahacking

Sensibiliser et préparer au risque grandissant

Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ne laisse plus aucun doute : avec les changements climatiques, la fréquence des inondations et les dommages qu’elles causent vont augmenter au fil du temps. Et face à cette éventualité, l’importance de sensibiliser les différents acteurs de la société civile s’impose. « Beaucoup de municipalités ne savent même pas quelle est leur exposition au risque d’inondation », souligne Hachem Agili.

De telles informations ne sont pas toujours faciles d’accès non plus. En ce sens, Geosapiens vient répondre à un besoin, estime Joanna Eyquem, directrice des programmes d’adaptation aux changements climatiques au Québec pour le Centre Intact sur l’adaptation au climat de l’Université de Waterloo.

Les outils traditionnels fournissent des données souvent incomplètes. « Il y a beaucoup de cartes qui ne sont pas à jour ou qui ne tiennent pas compte des changements climatiques. Elles sont surtout concentrées sur les inondations causées par les cours d’eau, et pas sur celles dues aux pluies intenses », illustre la spécialiste.

« Geosapiens fait le pont entre ce que font les chercheurs en hydrologie et les gens sur le terrain, grâce à des outils dont l’utilisation est intuitive et interactive », résume Karem Chokmani, cofondateur de Geosapiens et professeur titulaire à l’INRS. C’est d’ailleurs sous sa direction que les produits de l’entreprise ont été développés.

Interface principale d’E-NUNDATION, solution de Geosapiens pour la gestion opérationnelle des inondations © Geosapiens
Interface principale d’E-NUNDATION, solution de Geosapiens pour la gestion opérationnelle des inondations © Geosapiens

Prendre la bonne action, au bon moment

La plateforme de Geosapiens s’adapte à différents types de clientèles, qu’il s’agisse des instances gouvernementales, des assureurs, des professionnels de l’industrie de l’habitation ou bientôt des citoyens. Ces derniers pourront payer un certain montant pour entrer une adresse dans l’outil et générer un rapport sur l’exposition au risque de celle-ci.

Les villes, quant à elles, ont plutôt accès à des scénarios au sujet d’une région donnée. Les municipalités sont les premiers intervenants en cas de sinistre, rappelle Hachem Agili. Les prévisions élaborées par le logiciel peuvent être formulées jusqu’à six jours à l’avance et permettre de planifier la gestion de crise. « C’est toujours dans le but d’aider les décideurs à être plus efficaces et à prendre la bonne action au bon moment », résume-t-il. Ainsi, on peut calculer, par exemple, l’intensité du débit d’eau à un endroit donné et préparer le nombre de sacs de sable nécessaires.

C’est d’ailleurs dans cette optique que Geosapiens a conclu l’année dernière un partenariat avec la Ville de Rigaud, durement touchée par les débordements de la rivière des Outaouais en 2017 et en 2019. « Notre solution a été testée par différents services concernés par la gestion des inondations. C’est un outil important qui s’ajoute à leur gamme de solutions », se réjouit le cofondateur de Geosapiens.

Le but est vraiment d’agir en prévention et d’anticiper le risque, de ne pas être comme on l’a été dans les dernières années : les deux pieds dans l’eau, pris par surprise par ces événements climatiques.

Hachem Agili, PDG et cofondateur de Geosapiens

Inondation près de Montréal © Marc Bruxelle
Inondation près de Montréal © Marc Bruxelle

Anticiper le futur

La sensibilisation reste le plus grand défi pour l’entreprise. Ainsi, les municipalités tardent à changer la façon dont elles prévoient les risques d’inondation, croit Hachem Agili.

L’enjeu de la conscientisation s’étend également aux professionnels et aux citoyens. « On ne se pose pas vraiment la question à savoir quel sera notre risque futur si une catastrophe naturelle survient. Il y a beaucoup de travail d’éducation et de sensibilisation avant même de parler de commercialisation de produits innovants en lien avec les risques climatiques. »

Geosapiens déploie actuellement ses outils partout au Canada et souhaite étendre bientôt ses activités à l’étranger. L’entreprise désire aussi intégrer dans ses solutions d’autres aléas naturels tels que les feux de forêt et les séismes. « Le but est vraiment d’agir en prévention et d’anticiper le risque, de ne pas être comme on l’a été dans les dernières années : les deux pieds dans l’eau, pris par surprise par ces événements climatiques. »

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