La guerre des GES

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L’entreprise montréalaise GHGSat a mis au point un satellite révolutionnaire capable de mesurer depuis l’espace les gaz à effet de serre émis sur Terre. Son but : aider les gros pollueurs à identifier et à réduire leurs émissions.

Il ne faut jamais se fier aux apparences. Demandez donc à Claire : mis au point à Montréal par l’entreprise GHGSat, ce satellite de démonstration d’une quinzaine de kilos, à peine plus gros qu’un four à micro-ondes, fait pâlir de jalousie les mastodontes mis sur orbite par les grandes agences spatiales.

Petit, mais d’une précision redoutable, cet objet qui tourne autour de la Terre 15 fois par jour dans un axe nord-sud – à la vitesse de 7 km par seconde – est capable de calculer les concentrations de gaz à effet de serre (GES) avec une résolution de 30 m au sol. Équipé d’un spectromètre mesurant la quantité de lumière absorbée par différents gaz, il peut ainsi détecter le dioxyde de carbone et le méthane, qui constituent la majorité des émissions mondiales de GES résultant de l’activité humaine.

Fondateur de GHGSat, Stéphane Germain s’est engouffré dans la brèche créée par Québec lors de l’annonce du développement d’un marché du carbone commun avec la Californie, en 2010. En vertu du principe du pollueur-payeur, ce système oblige les entreprises les plus polluantes – celles émettant plus de 25 000 tonnes de GES par an – à passer à la caisse. Pour cet ingénieur physicien, l’occasion était belle : créer un satellite leur permettant de réduire leur empreinte carbone combinait sa passion pour l’espace et son intérêt pour l’enjeu des changements climatiques.

« Une idée folle », dit-il avec un sourire en repensant au défi écotechnologique qui a propulsé son entreprise sur la scène internationale. « Mesurer sur une échelle fine les gaz à effet de serre, avec une très haute résolution et à partir d’un satellite, personne ne pensait que c’était possible. »

Deux ans après son lancement depuis l’Inde, en juin 2016, le microsatellite Claire a prouvé le contraire en recueillant une grande quantité d’informations sur près de 3000 sites de différents secteurs d’activité : exploitations pétrolières, bassins de gaz de schiste, zones d’enfouissement de déchets, mines de charbon, fermes agricoles, complexes hydroélectriques, etc.

Univers parallèle

Plus précise et moins coûteuse que les techniques de mesure de GES au sol, la télédétection peut être effectuée toutes les semaines, précise l’entrepreneur.

« On utilise une caméra numérique, comparable à celle d’un téléphone intelligent. Le capteur va mesurer les concentrations de gaz dans un pixel. Plus la lumière est absorbée, plus la quantité de gaz présente dans chaque pixel de notre image est importante », explique-t-il. Un quart de million de pixels sont ainsi analysés pour déterminer le niveau de particules, en tenant compte de la vitesse et de la direction du vent, ce qui permet d’avoir une indication très précise du flux de GES à la source.

Cartographie des émissions de méthane émanant du barrage de Lom Pangar, au Cameroun.

Actuellement, une trentaine d’installations industrielles partout dans le monde bénéficient de l’expertise de l’entreprise montréalaise. Son microsatellite suscite beaucoup d’intérêt auprès des industries soucieuses de savoir combien de GES elles rejettent dans l’atmosphère.

Claire intéresse également des gouvernements en quête de technologies pouvant les aider à lutter contre les changements climatiques, poursuit Stéphane Germain. C’est notamment le cas de l’Alberta, souvent montrée du doigt pour ses émissions liées aux sables bitumineux, qui a financé en partie le deuxième satellite de la société, au nom moins poétique de GHGSat-C1. Son lancement y est prévu au début de 2019. Une vingtaine de ces sentinelles doivent être envoyées en orbite dans les prochaines années.

L’action de GHGSat face aux changements climatiques a aussi des avantages économiques : en huit ans, l’entreprise montréalaise est passée de 1 à 15 employés, un nombre appelé à augmenter dans les mois à venir avec le développement de nouveaux projets, ajoute Stéphane Germain.

Enfin, pour les entreprises qui font appel aux services de GHGSat, la mesure satellitaire comporte plusieurs avantages, notamment au plan financier (voir encadré). La fiabilité de cet instrument permet également d’affiner les statistiques fournies par les émetteurs industriels afin de déterminer si leur action face aux changements climatiques est sur la bonne trajectoire.

« On les aide à mieux identifier et à mieux mesurer leurs émissions de gaz à effet de serre pour qu’elles puissent mieux les contrôler », insiste Stéphane Germain, convaincu que la solution au problème d’émission des GES de serre viendra aussi des étoiles. Preuve que l’action face aux changements climatiques, c’est loin d’être de la science-fiction!

Les avantages de la télédétection

Mesurer les GES depuis l’espace coûte de 25 à 50 % moins cher que de les mesurer au sol, par exemple par l’installation de capteurs dans les cheminées des centrales électriques, l’utilisation de lasers ou de caméras infrarouges, ou encore le prélèvement manuel ou automatique d’échantillons de gaz dans des enceintes fermées.

La mesure à distance s’avère également plus sûre puisqu’elle évite la présence humaine sur des sites classés sensibles, tels ceux des compagnies pétrolières.

Le satellite offre enfin une fréquence d’analyses plus importante. « Avec Claire, on peut visiter un site toutes les deux semaines, plutôt qu’une fois par année avec les méthodes de mesure traditionnelles », indique Stéphane Germain, qui précise que cette fréquence ira en s’améliorant avec le lancement d’autres satellites.