Chaud devant

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16 août 2018 - Laurent Da Silva, Économiste principal chez Ouranos

3 h 37, le 4 juillet 2018 : Nick Vasilis, 65 ans, est retrouvé inerte dans son appartement de la rue Querbes, dans le quartier montréalais Parc-Extension. La température de son logement n’est pas descendue sous les 30 °C depuis quatre jours et autant de nuits. Meurtri par la vie et épuisé par la chaleur, il vient de rendre son dernier souffle. Nick n’aura pas vécu jusqu’à la fin ce mois de juillet le plus chaud enregistré à Montréal depuis 1921

Nick est un personnage fictif, mais inventé à l’aide des données bien réelles de la Direction régionale de santé publique de Montréal (DRSP) sur la pire canicule de la dernière décennie. Celle-ci aurait causé au bas mot 89 décès au Québec. Ils surviennent surtout dans les franges les plus vulnérables et les plus démunies de la population, celles qui vivent sans accès à la climatisation et dans des îlots de chaleur urbains.

Plus largement, des canicules comme celle que nous avons connue entre le 30 juin et le 8 juillet ont un impact direct sur la santé des Québécois. Pas besoin de torturer les données pour qu’elles parlent : il y a une relation claire et nette entre la température et les statistiques sanitaires. Que l’on regarde le nombre d’appels à Info-Santé, le nombre de transports ambulanciers ou les hospitalisations, toutes les statistiques explosent lors des périodes de chaleur extrême et font retentir une sonnette d’alarme.

Le graphique ci-dessous présente l’évolution du nombre de décès et de la température maximale journalière à Montréal lors de la canicule de cette année. La mortalité a atteint son maximum (56) le 5 juillet, alors que le thermomètre approchait les 35 °C.

Direction régionale de santé publique, CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, Canicule : Juillet 2018 – Montréal, Bilan préliminaire.

Le problème, c’est que les canicules comme celle du début juillet deviendront plus fréquentes, plus longues et plus intenses à l’avenir. Ainsi, la canicule de 2010, qui avait tué 280 personnes au Québec représente le type d’évènement  associé à une période de retour d’environ 25 ans. À la fin du siècle, ce type d’évènement pourrait devenir 25 fois plus fréquent (c’est-à-dire devenir la norme), si les émissions de gaz à effet de serre continuent au rythme actuel (Leduc et al., 2018).

L’augmentation de ces phénomènes extrêmes aura des répercussions économiques majeures. Au cours des 50 prochaines années, les vagues de chaleur pourraient causer des dommages estimés à plusieurs centaines de millions de dollars en raison de l’accroissement des soins de santé, du déploiement plus fréquent des plans de chaleur accablante, des pertes de productivité au travail et de l’accroissement des coûts de climatisation. C’est sans compter les 20 000 décès supplémentaires attribuables à la chaleur.

Comment gérer le problème? Le SUPREME – pour Système de surveillance et de prévention des impacts sanitaires des événements météorologiques extrêmes, un projet mené par l’Institut national de santé publique du Québec – fait un boulot de vigie incroyable et permet de mobiliser rapidement l’ensemble du réseau de la santé lors des périodes de canicule en mode gestion de crise. Mais ultimement, c’est par les villes qu’il faut attaquer le problème à la source. Celles-ci jouent en effet un rôle de premier plan pour réduire les impacts de la chaleur et limiter l’amplification des effets des îlots de chaleur urbains.

On voit se déployer, à l’heure actuelle, une série d’initiatives de verdissement et de lutte aux îlots de chaleur. Par exemple, dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, à Montréal, au moins 20 % de la superficie d’un terrain accueillant une nouvelle construction doit être aménagée avec des plantes, des arbres ou des arbustes en pleine terre. À Québec, un programme de rues conviviales redéfinit le réaménagement des rues dans les quartiers les plus défavorisés afin de les rendre non seulement plus propices au transport actif, mais aussi plus vertes, réduisant d’autant l’effet des îlots de chaleur. Montréal déploie des initiatives similaires avec les Rues piétonnes et partagées. À Mascouche, on crée un corridor vert avec la plantation de plus de 700 arbres.

Ces initiatives rendent nos milieux de vie plus agréables et plus beaux, mais elles ont aussi un impact direct sur notre santé et des avantages tangibles en termes de coûts de santé évités aujourd’hui et dans le futur. Mon travail vise à confirmer que ces initiatives sont rentables économiquement et socialement. Et elles le sont effectivement!

© Ville de Québec

À la lumière des plus récentes décisions gouvernementales ici et ailleurs, nous pourrions bien nous diriger vers un avenir chaud, très chaud même. Si tel est le cas, le record de juillet 2018 ne tiendra pas longtemps. Il est donc primordial que les initiatives des villes en matière de verdissement et de lutte aux îlots de chaleur passent de l’exception à la norme. Ça urge!

We shall not grow wiser before we learn that much that we have done was very foolish. (Nous ne deviendrons pas plus sages tant que nous n’apprendrons pas qu’une grande partie de ce que nous avons fait était de la folie.)

Friedrich Hayek, Prix Nobel d’économie 1974