Dossier spécial : Premières Nations, premières solutions , partie 1

Sipi Flamand : un Atikamekw en action pour le climat

Sipi Flamand
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Sipi Flamand ©Émélie Rivard-Boudreau

03 mars 2022 - Émélie Rivard-Boudreau, journaliste de l'Initiative de journalisme local

Que ce soit par les voyages, les films, les études supérieures ou la politique, Sipi Flamand carbure à un seul but : défendre sa nation et la survie de son territoire ancestral, le Nitaskinan. Unpointcinq s’est intéressé au parcours éloquent du vice-chef de la communauté atikamekw de Manawan.

Sipi Flamand a de grandes ambitions. « Mon rêve, c’est que Manawan devienne une communauté verte. Pour que ça puisse arriver, il faut qu’on devienne une communauté qui prend en compte sa relation avec le territoire. Rétablir cette relation que nos aînés, nos ancêtres, avaient. »

Pour atteindre ce but, il y a cependant « un gros travail à faire sur le plan social, politique et économique », admet-il. C’est pourquoi il use de ses expériences pour prêcher par l’exemple et inspirer sa communauté.  

Fils d’une mère enseignante et d’un père guérisseur traditionnel, ce jeune politicien de 32 ans occupe le poste de vice-chef depuis août 2018. Après ses études secondaires à l’école Otapi de Manawan, il est allé à Québec pour poursuivre des études collégiales en sciences humaines – relations internationales –, puis décrocher un baccalauréat en sciences politiques à l’Université Laval. « Ce qui m’a attiré vers la politique, ce sont les deux enseignements que j’ai eus de mes parents, tant sur le plan académique que sur la transmission des savoirs traditionnels », témoigne-t-il.

J’ai moi-même participé à différents projets de recherche avec des universités. C’est ça qui m’a permis de développer une approche de recherche dans ma communauté et c’est ce que je veux transmettre aux jeunesSipi Flamand

Militer par le cinéma

Dans son bureau situé dans une ancienne école défraîchie de Manawan, Sipi Flamand boit un maté, cette boisson traditionnelle sud-américaine du peuple guarani. Il a adopté ce rituel lors de séjours au Chili et en Argentine. « Là-bas, j’ai vu comment les communautés autochtones se mobilisent dans différents médias comme la radio communautaire et le cinéma. Il y a une grande différence dans la mobilisation sociale et politique. »

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Sipi Flamand à son bureau © Émélie Rivard-Boudreau

Ces rencontres ont poussé Sipi Flamand à utiliser le cinéma pour sensibiliser les siens. Avec le studio ambulant Wapikoni mobile, il a entre autres réalisé le film Onickakw! (Réveillez-vous!), qui traite de l’impact du colonialisme sur la relation entre les Atikamekw et leur territoire. « C’est un cinéma engagé. La tradition orale prend une grande importance dans notre manière de transmettre les savoirs et je trouve que le cinéma a une approche quand même similaire », estime-t-il.

Sa passion pour le partage des connaissances, la protection de l’environnement et le cinéma l’ont incité à créer le projet Notcimik avec des adolescents de Manawan : documenter en sons et en images l’impact des changements climatiques et les actions à entreprendre pour les limiter.

Ce projet amènera des jeunes sur le territoire ancestral, le Nistakinan, afin qu’ils interagissent avec des aînés de leur communauté. « Ils ont été formés pour manipuler une caméra et une enregistreuse. Ils ont aussi eu une formation sur la cartographie interactive pour collecter des données avec des GPS », indique Sipi Flamand.

Un groupe de troisième secondaire a été formé. Dans les prochains mois, les élèves se rendront en forêt pour filmer et recueillir des données environnementales. Ensuite, ils recevront une formation sur le montage et participeront à un camp scientifique.

Le but est aussi de susciter de l’intérêt pour la recherche auprès des jeunes. « J’ai moi-même participé à différents projets de recherche avec des universités. C’est ça qui m’a permis de développer une approche de recherche dans ma communauté et c’est ce que je veux transmettre aux jeunes », raconte celui qui est maintenant candidat à la maîtrise en études autochtones à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT).

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© Émélie Rivard-Boudreau

D’autres pas pour le climat

Conscient que les changements climatiques affectent grandement les Atikamekw, Sipi Flamand ne s’en tient pas qu’au cinéma pour faire sa part. Inspiré par les pratiques autochtones sud-américaines, il a notamment commencé à cultiver ses propres légumes. Le cinéaste voit bien que le comportement de certains animaux se modifie et que de nouvelles espèces animales apparaissent, comme des oiseaux de proie. Des cours d’eau harnachés par Hydro-Québec sont contrôlés pour éviter des inondations au sud de la province au printemps, mais pas dans les parcelles du territoire que la nation fréquente, qui sont parfois inondées.

Il y a deux ans, le Conseil de bande de Manawan a organisé un Salon du développement durable pour savoir ce que les autres communautés avaient entrepris pour lutter contre le réchauffement climatique. « Une personne de la communauté d’Ekuanitshit (Mingan) est venue faire une présentation sur leur jardin communautaire et le compost. Ils ont expliqué comment on peut générer de l’énergie avec le compost, et on a eu l’idée de développer ce projet-là dans notre communauté », raconte-t-il.

Mais avant d’aller de l’avant avec un tel projet, Manawan doit d’abord mieux maîtriser l’art de la gestion des déchets. Cela peut sembler rudimentaire à des gens qui vivent dans des municipalités ailleurs au Québec, mais c’est problématique pour la communauté de Sipi Flamand. L’écocentre local existe seulement depuis 2018 et encore beaucoup de déchets sont laissés en forêt.

Territoire, réserve, ou communauté?

Le terme « communauté » fait référence à ce que la Loi sur les Indiens nomme « réserve indienne ». Bien que le terme officiel de la Loi demeure toujours « réserve », les Autochtones utilisent plutôt le terme « communauté » pour définir le village où ils habitent. Lorsqu’il est question de « territoire », on parle d’une étendue plus vaste qui représente l’étendue géographique traditionnelle fréquentée par une nation avant la colonisation et encore aujourd’hui. C’est dans le territoire que les différentes Premières Nations du Québec cueillent, chassent et tiennent des cérémonies spirituelles.

Pick up et VUS

Déterminé, Sipi Flamand a aussi été l’instigateur, il y a deux ans, d’une Semaine sans voiture. Il n’a toutefois pas obtenu le succès escompté. Le vice-chef croit que la forte population de chiens errants dans les environs et la géographie qui fait que le territoire de la communauté est divisé par une pente abrupte, de même que la durée du défi ont découragé les membres d’y participer.

« Si on le refait, qu’on fait une bonne campagne de promotion, et qu’on parle des bienfaits pour la santé physique, la santé mentale et d’autres éléments, je pense qu’il y aurait moyen d’intégrer aussi dans le discours les effets positifs que ça aurait par rapport aux changements climatiques », considère-t-il.

Presque tous les conducteurs et conductrices de Manawan possèdent une camionnette (pick up) ou un véhicule utilitaire sport (VUS). Même Sipi Flamand! Selon lui, ce type de véhicule est essentiel pour assurer des déplacements sécuritaires dans la communauté.

En effet, Unpointcinq l’a appris à ses dépens! Voulant limiter les gaz à effet de serre associés à son déplacement, l’autrice de ce texte a choisi une voiture de location de type berline pour visiter la communauté. Résultat? Un sauvetage a été nécessaire pour remorquer la voiture qui s’était enfoncée dans l’eau glacée sur un chemin forestier! Morale de l’histoire? Oui, il faut agir pour le climat, mais dans certaines situations, il faut aussi privilégier la sécurité!

Voiture dans la glace
©Émélie Rivard-Boudreau

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