Dossier spécial : Les villes en mode solution , partie 1

Propulser la mobilité durable en ville

Partage de la route
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©luca pbl /Shutterstock

09 octobre 2021 - Simon Diotte, Coureur des bois dans l'âme

Le secteur qui produit le plus d’émissions de gaz à effet de serre (GES) au Québec est sans conteste celui du transport, bien loin devant l’industrie et le bâtiment. La solution pour renverser la vapeur : promouvoir la mobilité durable dans les villes.

Élargissement du parc automobile, obésité croissante des voitures, expansion du camionnage lourd, congestion en hausse… Le bilan carbone du transport routier au Québec ne s’améliore pas; il empire même.

À preuve : la quantité de GES émise par les véhicules en circulation sur nos routes a explosé de 58,6 % de 1990 à 2018. À lui seul, le transport routier est responsable de 35,6 % des GES de la province, contre 30 % pour le secteur industriel, 10 % pour celui du bâtiment et 9,6 % pour le secteur agricole. C’est surtout le seul qui a connu une hausse de ses émissions durant ces 28 années, selon le dernier inventaire québécois des émissions de GES.

L’heure est venue de prendre un virage, urgent les experts en climatologie et en mobilité durable, car on ne roule pas dans la bonne direction. « À travers le Québec, on construit encore des quartiers qui dépendent entièrement de l’automobile. C’est comme si on n’apprenait rien des erreurs urbanistiques du passé », constate la professeure à Polytechnique Montréal, Catherine Morency, également titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la mobilité des personnes.

Le problème vient tant de l’insuffisance des transports en commun dans ces nouveaux quartiers que de la conception des rues en forme de spaghetti. « Il est très difficile pour les piétons et les cyclistes de s’y déplacer de façon efficace. Les résidents peuvent habiter à 1 km à vol d’oiseau d’une épicerie, mais ils doivent faire de grands détours pour y accéder. C’est un problème majeur », détaille-t-elle.

Besoin d’un régime minceur

Pour espérer réduire l’empreinte carbone du transport, il faut d’abord sortir de la tendance à l’obésité spatiale, selon les mots de Catherine Morency. Chaque individu consomme de plus en plus de ressources : grosse maison, gros terrain, grosse voiture et gros kilométrage pour se déplacer. « Résultat : on a besoin de plus en plus d’infrastructures pour accommoder de moins en moins de personnes. C’est un mode de vie contraire à nos ambitions climatiques », déplore-t-elle.

Directeur général de l’organisme Vivre en ville, qui promeut les meilleures pratiques en matière de collectivités durables, Christian Savard affirme qu’il est difficile d’ébranler la place de l’automobile au Québec. « Mais le vent tourne tranquillement », observe-t-il. « Des investissements majeurs sont en cours dans le transport collectif, comme le prolongement de la ligne bleue et le Réseau express métropolitain (REM) à Montréal ou encore les projets de tramway à Québec et à Gatineau. Malgré la COVID-19, les municipalités doivent garder le cap sur les investissements en transport collectif. C’est la seule façon de décongestionner nos routes et d’atteindre nos objectifs climatiques. »

L’ennemi principal de la mobilité, c’est l’étalement urbain. On espère que la future stratégie provinciale sur l’aménagement du territoire, actuellement à l’étude, forcera les municipalités à s’attaquer à cet enjeu.
Magali Bebronne, directrice des programmes à Vélo Québec

Le transport collectif n’est plus l’apanage des grandes villes. Hors des grands centres, des services se mettent en place depuis quelques années avec succès. Par exemple, la Régie intermunicipale de transport Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine enregistre déjà plus de 70 000 déplacements par an.

Du côté du transport actif, ça bouge plus que jamais. « On connaît un engouement sans précédent pour la construction de pistes cyclables », se réjouit Magali Bebronne, directrice des programmes à Vélo Québec. Outre Montréal, chef de file en matière de vélo, Gatineau a aussi un plan précis afin de devenir une ville où il fait bon pédaler.

Des rues plus équilibrées

De bonnes nouvelles, mais on ne règle pas des décennies de mauvaises planifications urbaines en quelques années. « L’ennemi principal de la mobilité, c’est l’étalement urbain. On espère que la future stratégie provinciale sur l’aménagement du territoire, actuellement à l’étude, forcera les municipalités à s’attaquer à cet enjeu », signale Magali Bebronne.

En attendant, que faire? Au chapitre de l’aménagement des quartiers, ces derniers doivent devenir des lieux de vie aux multiples usages : logements, commerces en tout genre, pôle d’emplois, espaces verts, etc. La configuration doit prendre en compte les différents modes de déplacement et éliminer les barrières physiques. « L’accès simple et facile au transport en commun à pied et aux services fait évidemment partie de l’équation », explique Catherine Morency. La spécialiste propose de rétablir l’équilibre entre les fonctions de la rue. « Elle ne doit pas servir uniquement aux autos, mais à toutes les clientèles, équitablement. » Halte-là aux quartiers sans trottoir!

Dans cette logique-là, il faut imaginer des lieux de vie orientés autour du transport collectif et actif. « Il faut aussi augmenter la fréquence des passages des autobus et l’amplitude des services. Le transport en commun ne devrait pas être facilement accessible uniquement pendant les heures de pointe, mais de l’aube jusque tard en soirée », soutient Christian Savard, de Vivre en ville.

On peut bien ajouter des autobus, encore faut-il encourager les gens à monter à bord. Professeure à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage à l’Université de Montréal, Paula Negro-Poblete insiste sur les aménagements urbains. « On doit construire des abris d’autobus pour que les usagers puissent s’y abriter l’hiver, et ajouter des bancs et des parcs afin que l’expérience en transport en commun soit la plus agréable possible. Sinon, les gens pendront l’auto », remarque-t-elle.

Les villes devraient aussi encadrer les stationnements, en limitant les cases de stationnement pour voiture, en augmentant les cases réservées à l’autopartage et au covoiturage et en imposant des stationnements à vélo.
Aline Berthe, présidente de l’Association des centres de gestion des déplacements du Québec

Ne pas négliger les parcs industriels

Aujourd’hui, les services de transport en commun dirigent principalement les usagers vers les centres-villes, en négligeant les autres pôles d’emplois. « Les secteurs industriels sont souvent mis à l’écart et restent difficiles d’accès », souligne la présidente de l’Association des centres de gestion des déplacements du Québec, Aline Berthe.

Selon elle, les municipalités doivent se munir d’un plan de mobilité durable qui prend en compte les déplacements de leurs propres citoyens, mais également des personnes qui viennent y travailler. « Les villes devraient aussi encadrer les stationnements, en limitant les cases de stationnement pour voiture, en augmentant les cases réservées à l’autopartage et au covoiturage et en imposant des stationnements à vélo. »

Pourquoi pas des voies cyclables dans ces zones industrielles souvent arides pour le transport actif? « On sait pourtant que les employés qui viennent à vélo ou à pied sont plus productifs que la moyenne. Pourtant, peu d’infrastructures favorisant le transport actif en milieu industriel ont vu le jour au Québec », regrette l’experte.

Une autre façon de faire serait que les municipalités soutiennent davantage les gens qui adoptent des comportements écoresponsables. « En ce moment, on encourage l’électromobilité en subventionnant l’achat de voitures électriques, mais il n’existe rien pour les personnes qui se démotorisent », fait remarquer Catherine Morency. Résultat : le client qui se rend à pied au centre commercial de banlieue n’a droit à aucun privilège. « Ces gens-là financent, par leurs achats, les places de stationnement sans les utiliser », souligne la professeure.

Courage politique exigé

L’implantation d’une politique de mobilité durable prend souvent du courage politique. « Quand on veut aménager une piste cyclable, par exemple, ça fait un tollé, car les gens y voient l’élimination d’une voie accessible aux automobiles. Dans ce contexte, pas facile de garder le cap », admet Magali Bebronne, de Vélo Québec. Pensons à l’opposition au Réseau express vélo (REV) sur la rue Saint-Denis, à Montréal. Jamais une telle infrastructure cyclable n’a fait autant couler d’encre. « Un an plus tard, c’est pourtant un succès. Personne ne semble préconiser un retour en arrière », constate Christian Savard.

Un plan pour réduire la dépendance à l’auto-solo

Depuis 2016, l’arrondissement de Saint-Laurent, à Montréal, oblige les promoteurs de tout projet immobilier, qu’il soit institutionnel, commercial ou industriel, générant plus de 100 cases de stationnement, à déposer un plan de gestion de déplacement. Élaboré par des professionnels du domaine et mis à jour tous les trois ans, il doit viser à offrir aux employés des solutions de rechange à l’auto-solo.

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