Les déjections animales, de déchets bruns à énergie bleue

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©Sébastien Thibault
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29 septembre 2021 - Simon Diotte, Coureur des bois dans l'âme

Oubliez le gaz de schiste, la prochaine source d’énergie qui proviendra de nos campagnes, c’est le biogaz généré par le fumier et le lisier. En plus d’apporter des revenus supplémentaires aux agriculteurs, la biométhanisation des excréments d’origine animale réduit considérablement les émissions de gaz à effet de serre. Portrait d’une filière énergétique qui se développe à pleins gaz.

Pendant des décennies, on a rêvé au Québec de découvrir des sources exploitables d’énergie fossile, que ce soit sur l’île d’Anticosti ou en Gaspésie, imaginant d’immenses retombées économiques. En vain. Pourtant, une source d’énergie propre se trouvait, depuis toujours, dans notre cour arrière : les déjections animales.

Grâce au processus de biométhanisation, il est possible depuis longtemps de transformer le lisier et le fumier en gaz naturel renouvelable (GNR), une énergie propre qui se substitue au gaz naturel provenant des énergies fossiles. En Europe, en Asie et même en Ontario, les projets de biométhanisation fonctionnent déjà à plein régime, mais au Québec, en raison notamment des bas coûts de l’électricité, la province a pris du retard en la matière.

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À Warwick, un complexe de biométhanisation vient de commencer sa production. ©Francis Perreault

Toutefois, les choses changent rapidement, sous l’impulsion des politiques gouvernementales vers une économie sobre en carbone. Québec a fixé une cible minimale de 10 % de GNR dans le réseau gazier d’ici 2030. Résultat : des complexes de biométhanisation se développent un peu partout dans les campagnes québécoises. L’un d’entre eux, la Coopérative Agri-Énergie de Warwick, vient de commencer sa production, lançant une nouvelle ère à la campagne.

La naissance d’une filière

Le potentiel de GNR produit à partir des déjections animales et des résidus agricoles est immense, affirme Raphaël Duquette, chef de service développement des gaz renouvelables chez Énergir. « Le milieu agricole pourrait fournir jusqu’à 5 % de nos besoins en gaz naturel au Québec d’ici 2030. Nous ne sommes qu’à la naissance de cette filière », indique-t-il.

Les bienfaits de cette source d’énergie sont multiples, tant pour les distributeurs et les producteurs de gaz que pour les agriculteurs, sans compter les énormes bénéfices pour le climat, note Josée Chicoine, directrice agroalimentaire de la Coop Carbone, un organisme qui soutient la création de projets collaboratifs visant la réduction des gaz à effet de serre (GES). Créée entre autres par Fondaction et le Mouvement Desjardins, la coopérative pilote le complexe de biométhanisation de Warwick.

Le milieu agricole pourrait fournir jusqu’à 5 % de nos besoins en gaz naturel au Québec d’ici 2030.
Raphaël Duquette, chef de service développement des gaz renouvelables chez Énergir

Le premier avantage de faire du gaz avec des excréments d’animaux de la ferme, c’est pour les agriculteurs. En formant des coopératives, comme dans le cas de Warwick, ils tirent un revenu de la transformation de leur fumier en biogaz. « Un revenu d’appoint qui aide à la pérennisation du secteur agricole », souligne Josée Chicoine, agronome de formation.

Une fois traitées, les déjections animales sont mélangées à des résidus agricoles pour produire du digestat. Il s’agit d’un engrais extrêmement riche que les agriculteurs épandent ensuite sur leurs terres comme fertilisant. « À la sortie de l’usine de Warwick, les producteurs agricoles profitent d’un engrais presque deux fois plus riche que l’intrant au départ. Son épandage réduit ainsi de façon importante leurs besoins de fertilisant et donc leurs coûts de production », explique celle qui est aussi codirectrice de la Coop de Warwick.

Le digestat a aussi une charge odorante bien moindre que le fumier à l’état pur, ce qui favorise une meilleure cohabitation entre les agriculteurs et leurs voisins.

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Rien qu’à Warwick, la production de GNR évitera l’émission de 6500 tonnes d’équivalent CO2 par an. ©Coop carbone

Un scepticisme de bon aloi

Et c’est sans compter les bénéfices pour le climat. Actuellement, le fumier et le lisier sont entreposés dans les fermes entre les périodes d’épandage dans les champs. Leur décomposition génère du méthane, un GES 25 fois plus nocif que le CO2 lorsqu’il est relâché dans l’atmosphère.

Pour les transformer en GNR, les déjections animales sont recueillies fraîches et envoyées au complexe de biométhanisation, où le méthane est capté pour ensuite être injecté dans la ligne de gaz naturel. « À Warwick, c’est plus de 90 % du méthane dans le lisier qui est récupéré », dit Josée Chicoine. Au bout du compte, rien qu’à Warwick, la production de GNR évitera l’émission de 6500 tonnes d’équivalent CO2 par an, ce qui correspond aux émissions annuelles de GES de 680 Québécois.

« Ce type de GNR est considéré comme ayant une intensité carbone négative dans l’ensemble de son cycle de vie, car il évite aussi les émissions à la source », explique Vincent Regnault, directeur approvisionnement gazier et développement gaz renouvelables chez Énergir.

Malgré ses avantages, la production de GNR affronte un vent contraire provenant du milieu agricole. Paul Doyon, de l’Union des producteurs agricoles (UPA), demeure sceptique quant aux retombées de cette industrie. « Il reste encore beaucoup d’inconnues. Par exemple, on ne connaît pas la capacité des sols à recevoir le digestat ni les revenus que les agriculteurs peuvent en tirer. »

Un scepticisme de bon aloi, conviennent Raphaël Duquette, d’Énergir, et Josée Chicoine, de la Coop Carbone. « D’où l’importance d’intégrer les agriculteurs en amont dans la planification de nos projets », dit Josée Chicoine.

« Quand les usines fonctionneront à plein régime, que les retombées seront au rendez-vous, nous allons vaincre la résistance », assure de son côté Raphaël Duquette.

En attendant, le fumier fait de plus en plus sentir sa présence dans les campagnes du Québec, mais pour de bonnes raisons !

Cet article provient d’un cahier spécial «Une agriculture à la fois responsable, victime et solution», publié par le quotidien Le Devoir, en partenariat avec Unpointcinq.

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