Dossier spécial : (In)justice climatique , partie 3

Pour Parole d’excluEs, la population fait partie de la solution

Tente d'exposition
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©Parole d’excluEs
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À Montréal-Nord, un organisme communautaire s’est fixé comme mission de donner une voix aux populations trop souvent absentes des discussions. Entre mobilisation citoyenne et recherche, Parole d’excluEs veut coconstruire un monde juste, équitable et le plus vert possible.

C’est mercredi, l’heure du lunch tire à sa fin. Dans une atmosphère conviviale et chaleureuse, la petite équipe de Parole d’excluEs se remet au boulot. Les bureaux de l’organisation se situent au cœur de l’arrondissement, tout près de l’école secondaire Calixa-Lavallée.

« Quand Parole d’excluEs est arrivée ici [l’îlot Pelletier], c’était un secteur avec beaucoup d’enjeux de violence et de criminalité, explique le codirecteur et responsable de la recherche, Grégoire Autin. Grâce à un partenariat avec la Société d’habitation populaire de l’Est de Montréal (SHAPEM) et l’engagement de la population, le quartier a été complètement transformé. »

Selon la philosophie de Parole d’excluEs, c’est par « le lieu de vie que l’on mobilise ». Cette volonté d’être proche des citoyens et citoyennes dicte les décisions et actions de l’organisation depuis sa genèse au début des années 2000.

« On identifie les lieux où il y a beaucoup de facteurs de défavorisation sociale, ajoute-t-il. Le fait que nos bureaux soient installés ici n’est pas un hasard ; on est là où les gens habitent. »

L’organisme nord-montréalais, fondé par Patrice Rodriguez, figure bien connue du milieu communautaire, veut susciter la parole et la mobilisation citoyenne des personnes en situation d’exclusion et de pauvreté. Pour atteindre cet objectif, les membres de l’équipe ont choisi de « cultiver le vivre-ensemble ».

« Je pense qu’on tient souvent la notion de vivre-ensemble comme quelque chose d’acquis, poursuit Grégoire Autin. Alors que nous savons que c’est vraiment la base pour mobiliser. Il faut créer de la solidarité, il faut que les gens se connaissent, acceptent de se parler, il faut qu’il y ait des échanges intergénérationnels et interculturels. »

Pour y arriver, différentes activités sont organisées tout au long de l’année, comme des conférences, des ateliers ou des repas communautaires (où différentes cuisines du monde sont à l’honneur chaque fois). D’après Parole d’excluEs, ces rencontres permettent de renforcer le tissu social et le sentiment d’appartenance.

Personnes préparant des repas
©Parole d’excluEs

Un axe recherche-action

Que ce soit pour l’axe de mobilisation ou celui de la recherche, Grégoire Autin tient à le répéter : tout est fait en symbiose avec la population. Dans cette optique, on ne perçoit pas les Nord-Montréalais et Nord-Montréalaises seulement comme des bénéficiaires, mais comme des parties intégrantes de la solution.

« C’est important de travailler à partir des besoins de ces personnes à la co-construction des projets de solutions, soutient le sociologue, employé de l’organisme depuis quatre ans. Dans l’ADN de Parole d’excluEs, tout part de la parole citoyenne. »

L’axe de recherche est un volet incontournable de l’organisation. Après avoir travaillé sur le terrain, pris le pouls de la population et vu ressortir des enjeux, l’équipe approfondit ses connaissances. Ces nouveaux savoirs sont ensuite transmis dans des projets de recherche et des activités de transfert.

« On a une équipe de mobilisation, une équipe de recherche, on travaille main dans la main, on voit ça comme deux approches complémentaires », image Grégoire Autin.

La transition écologique, enjeu transversal

Et la transition écologique dans tout ça? Grégoire Autin assure qu’elle est toujours dans les réflexions, mais souvent présente en filigrane d’autres enjeux plus criants, comme la sécurité, l’alimentation ou la santé.

« Juste derrière ici, il y avait avant un stationnement bétonné avec une problématique de trafic de drogue. Avec les citoyens, tout a été « désasphalté », et un jardin collectif a vu le jour, un tout nouveau lieu de vie commun. Est-ce que ce genre de projet s’inscrit dans la transition écologique? Oui. Mais est-ce qu’on l’a fait pour des raisons écologiques? Pas nécessairement. On voulait surtout montrer à la population qu’elle pouvait se réapproprier son espace. »

Mais selon le codirecteur de l’organisation, il serait faux de croire que les Nord-Montréalais et Nord-Montréalaises montrent de l’indifférence envers la crise écologique, surtout que les effets des changements climatiques les frappent de plein fouet chaque été.

« Les îlots de chaleur, c’est de pire en pire dans le quartier, avance-t-il. Je t’invite à venir faire du porte-à-porte en juillet : on monte aux étages supérieurs des immeubles, il fait genre 50 degrés, c’est hardcore. Tu le vois dans les statistiques, Montréal-Nord est un des endroits avec le moins d’espaces verts par habitant. Tout est lié. »

Jeunes faisant de la peinture
©Parole d’excluEs

 Parole d’excluEs et moi, c’est une belle histoire d’amour. Il y a quelques années, je suis tombée sur une de ses activités par hasard. J’ai découvert une vie citoyenne, sociale, dynamique à deux pas de chez moi. Ça m’a beaucoup aidé pendant la pandémie ; je sens que nous avons traversé ça tous ensemble.
Doan Trang Phan, participante

Solidarité et sécurité

Après 20 ans d’existence, Parole d’excluEs s’est forgé une réputation enviable dans le quartier. De plus en plus de personnes sont au rendez-vous lors des activités. Parmi les participants et participantes, on trouve régulièrement Doan Trang Phan.

D’origine vietnamienne, elle est arrivée à Montréal-Nord dans les années 80, dans la foulée de la crise des boat people, une tranche de l’histoire déchirante qui a laissé des cicatrices indélébiles sur une génération d’immigrants et immigrantes.

« Mon frère et moi, nous avons menti sur notre âge pour avoir plus de chances d’être adoptés au camp de réfugiés. Il faut savoir que c’était une question de survie : les adolescents n’étaient pas très populaires pour l’adoption. J’ai traîné longtemps une culpabilité d’avoir menti… En bonne catholique je suis allée me confesser plus tard », dit-elle en riant, comme pour dédramatiser sa propre vie.

Doan Trang Phan
©Courtoisie Doan Trang Phan

Celle qui est devenue actuaire spécialisée en sécurité sociale, un métier qu’elle a aussi pratiqué en France et au Mali, habite toujours le quartier et y a élevé deux enfants. Parole d’excluEs lui a permis de « reconnecter » avec Montréal-Nord.

« Parole d’excluEs et moi, c’est une belle histoire d’amour, laisse-t-elle tomber. Il y a quelques années, je suis tombée sur une de ses activités par hasard. J’ai découvert une vie citoyenne, sociale, dynamique à deux pas de chez moi. Ça m’a beaucoup aidé pendant la pandémie ; je sens que nous avons traversé ça tous ensemble. »

On peut maintenant la retrouver dans différentes mobilisations sociales, toujours prête à donner un coup de main. Son engagement dans la vie communautaire lui permet également de mettre un baume sur certaines blessures de son passé.

« J’ai réalisé que, pour ma santé mentale, j’avais besoin de ce lien social. Je n’en étais pas consciente avant. Je me sens en sécurité, avec des gens qui ont de belles valeurs humaines, qui donnent leur temps. Pour moi et ma famille, qui avons vécu la cruauté de la guerre, ça fait énormément de bien. »

Bien que touchante, l’histoire de Doan Trang Phan n’est pas unique. Pour de nombreuses personnes, la vie communautaire permet de mieux vivre avec les embûches du passé, du présent et du futur. Au dire de Parole d’excluEs, c’est cette solidarité qui permettra à Montréal-Nord de se construire un avenir à sa juste valeur.

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