Dossier spécial : Précieuses ressources , partie 4

Trois idées pour une transition énergétique juste et équitable

Arrière-plan papier recyclé avec une balle de papier écumée verte comme ampoule
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10 octobre 2022 - Maxime Bilodeau, En paix avec ses contradictions

La nécessité d’un passage à une économie sobre en carbone pour faire face à l’urgence climatique ne fait plus de doute. Comment faire pour que ce virage soit gagnant pour tout le monde ?

Écologique, juste, équitable, bas carbone… Il n’existe pas une seule, mais bien des transitions, selon le qualificatif qu’on lui accole. « En analyse du discours environnemental, on parle de concept contestable : il est reconnu par tous les acteurs du débat sur la crise climatique, y compris institutionnels, mais personne ne lui donne la même définition », explique René Audet, professeur au Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et sociologue de l’environnement.

La vaste majorité s’entend cependant pour dire qu’il faut transformer le système énergétique mondial pour réussir la transition, c’est-à-dire atteindre les objectifs fixés par l’Accord de Paris. À l’heure actuelle, les combustibles non durables fournissent environ 80 % de l’énergie sur la planète. « Dans son dernier rapport, le GIEC rappelle que nous disposons d’une marge de manoeuvre (d’un budget, en quelque sorte) d’environ 500 Gt de CO2 pour espérer limiter le réchauffement à 1,5 °C. Or, on prévoit que les infrastructures fossiles dans le monde vont émettre quelque 650 Gt de CO2 d’ici à ce qu’ils soient mis hors fonction dans les prochaines décennies », précise Colin Pratte, chercheur associé à l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS).

Cette explosion effective du budget carbone de l’humanité est riche en implications. Non seulement il devrait y avoir un moratoire sur tout nouveau projet d’exploitation de charbon, de gaz naturel et de pétrole, selon le chercheur, mais il faudrait aussi démanteler les infrastructures « fossiles » existantes. Comment faire pour négocier ce virage tout en minimisant les dommages collatéraux infligés aux communautés qui seront inévitablement touchées ? Voici trois pistes de solution.

1. Impliquer les travailleurs

L’Organisation internationale du travail (OIT), une agence spécialisée de l’ONU, estime que les changements climatiques provoqueront la perte de 80 millions d’emplois d’ici à 2030. Le secteur de l’énergie, en particulier l’extraction pétrolière et le raffinage, sera principalement concerné. « Tu bosses chez Énergir ? Il se peut qu’une éventuelle chute de l’utilisation du gaz naturel menace ton gagne-pain », illustre Yvan Duceppe, trésorier de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) — qui représente les travailleurs de l’entreprise québécoise de distribution de gaz naturel — et responsable du dossier environnemental.

Mais il y a de l’espoir : l’OIT prévoit aussi que la transition énergétique pourrait créer des emplois plus nombreux et de meilleure qualité, entre autres dans le secteur des énergies renouvelables, avec un potentiel de 18 millions d’emplois nets d’ici 2030. À condition que des mesures ambitieuses soient prises en ce sens. « Il est question de politiques de formation et de reconversion d’emploi soutenues par des budgets conséquents », souligne le syndicaliste, citant le cas des mécaniciens automobiles qui devront mettre à jour leurs connaissances pour réparer les véhicules à propulsion électrique.

« Les divers ordres de gouvernement doivent permettre aux employeurs et aux travailleurs de participer aux prises de décisions à leurs côtés », martèle M. Duceppe. Ce dialogue social est, selon lui, la clé de voûte pour concilier les objectifs économiques et sociaux avec les préoccupations environnementales.

2. Prendre en compte les externalités négatives

Les besoins énergétiques du Québec sont comblés à un peu plus de 50 % par des énergies fossiles, le pétrole et le gaz naturel en tête. Le secteur des transports en est tout particulièrement friand ; il était responsable de 43 % des émissions totales de gaz à effet de serre de la province en 2019. À lui seul, le transport routier représente même près de 80 % des émissions du secteur des transports, soit 34 % des émissions totales de GES. C’est pourquoi le gouvernement du Québec fait de l’électrification des transports une priorité absolue. « Miser seulement sur ce cheval de bataille est dangereux », met cependant en garde Colin Pratte. Car ce projet nécessite une importante extraction minière, pouvant générer des conflits entre industrie, écosystèmes et communautés.

La saga de la fonderie Horne de Rouyn-Noranda, qui a fait les manchettes cet été en raison des contaminants rejetés par l’usine, illustre bien ces tensions. Pour rappel : l’entreprise propriété de la multinationale Glencore est l’une des principales productrices mondiales de cuivre… un des précieux métaux qui rentrent dans la fabrication des batteries des voitures électriques. « Il faut tenir compte de l’ensemble des conséquences sociales et écologiques derrière les mesures prises au nom de la transition énergétique », affirme Colin Pratte.

Il faut réfléchir aux ressources que nous exploitons, en réintégrant par exemple la planification économique dans les discours gouvernementaux. Cela passe notamment par davantage de participation citoyenne dans les processus démocratiques.

René Audet, professeur au Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et sociologue de l’environnement

3. Opérer des changements systémiques

Plusieurs des mesures proposées pour accélérer la transition énergétique font reposer la responsabilité sur les épaules des individus plutôt que du collectif. Ce fardeau est lourd pour ceux et celles qui sont contraints d’utiliser des moyens polluants — la voiture à essence, par exemple — pour vaquer à leurs occupations, faute de pouvoir se procurer des solutions plus satisfaisantes.

« Le discours dominant des changements de comportements individuels entretient le statu quo. C’est comme si on désignait la consommation comme grande coupable : si on pollue autant, c’est parce que le consommateur en redemande », déplore René Audet. Le grand absent de cette analyse est, selon lui, la production. « Il faut réfléchir aux ressources que nous exploitons, en réintégrant par exemple la planification économique dans les discours gouvernementaux. Cela passe notamment par davantage de participation citoyenne dans les processus démocratiques », conclut-il.

Cet article provient d’un cahier spécial «Précieuses Ressources», publié par le quotidien Le Devoir, en partenariat avec Unpointcinq.

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