Dossier spécial : Repenser nos transports , partie 6

Faire la chasse aux émissions de GES par la fiscalité

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©Shutterstock / hxdbzxy
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Retombées positives générales

Petit tour d’horizon de mesures fiscales à visée climatosympathique pour décarboniser nos déplacements quotidiens.

Au Québec, le transport routier des particuliers, soit les voitures et les camions légers, représente la part du lion (35,6 %) des émissions de gaz à effet de serre (GES). Pour favoriser des déplacements plus sobres en carbone, un éventail de mesures fiscales existent. Quelle est leur efficacité, mais aussi, quelles sont leurs limites ? Nous avons interrogé quatre experts : Michel Poitevin (professeur au Département de sciences économiques de l’Université de Montréal), Guillaume Hébert (chercheur à l’IRIS, l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques), Luc Godbout et Michaël Robert-Angers (de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke).

La taxe sur l’essence

Le principe est simple : on augmente le prix de l’essence pour envoyer un signal aux automobilistes. « Lors de l’achat d’un véhicule neuf, le consommateur considère le prix actuel de l’essence et se demande s’il peut s’offrir un véhicule qui consomme autant », résume Michaël Robert-Angers. Ces dernières années, l’explosion du nombre de camions légers sur les routes coïncide d’ailleurs avec un coût du litre relativement bas.

Cette mesure plaît généralement aux économistes, car elle taxe la pollution à la source, mais moins aux citoyens. Calculer la taxation idéale n’est pas aisé : si elle doit être importante pour influencer les comportements, le montant de 210 $ la tonne de carbone (ou 40 cents le litre d’essence) calculé par la Commission de l’écofiscalité du Canada pourrait entraîner une levée de boucliers. Une taxe qui augmente de quelques sous par an pourrait faire l’affaire, pense Luc Godbout.

Pour Michel Poitevin, le secret de la réussite réside dans le maintien d’un fardeau fiscal stable, c’est-à-dire que parallèlement, d’autres taxes ou impôts doivent baisser. Afin de punir les gros consommateurs et de récompenser les bons élèves, le gouvernement Trudeau a choisi de redistribuer les sommes récoltées par le biais de sa taxe sur le carbone à l’ensemble de la population, une solution qui fait consensus parmi les experts consultés.

Un malus à l’achat (ou à l’utilisation) d’un véhicule polluant

Il s’agit de rendre certains véhicules (à commencer par les VUS) moins attrayants en faisant grimper leur prix d’achat. Par exemple, en France, il faudra payer 10 € (15 $) pour chaque kilo au-delà du poids de 1,8 tonne dès 2022. La mesure déplaît à Michel Poitevin, car elle ne prend pas en compte l’utilisation du véhicule : on paie la même taxe que l’on parcoure 5000 ou 50 000 km par an.

Mais elle séduit les autres. Guillaume Hébert apprécie le fait qu’elle épargne les moins nantis, alors que Luc Godbout y voit un complément idéal à la taxe sur l’essence. Selon lui, ce malus pourrait même être annuel, par une hausse du coût d’immatriculation des VUS. Simultanément, on pourrait imaginer un bonus pour les véhicules électriques, qui coûteraient moins cher à immatriculer.

Une taxe sur l’essence ou le kilométrage parcouru pour financer le transport collectif

Cela se fait déjà en Gaspésie et à Montréal, où le prix du litre est respectivement majoré de 1 et 3 cents. Pourrait-on étendre ce concept à tout le Québec ? Pourquoi pas, répondent nos interlocuteurs, car toute taxation de l’essence est bonne, et tant mieux si l’argent perçu est ensuite utilisé à bon escient. Cependant, une taxe d’un montant aussi faible est presque invisible par rapport aux fluctuations du prix du baril de pétrole, donc elle pourrait ne pas suffire à changer les comportements.

Autre option : financer le réseau de transport en commun par une taxe kilométrique qui remplacerait la taxe sur l’essence lorsque la transition vers l’électrique sera terminée, comme le propose la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Cela est faisable, commente Luc Godbout, mais pose des questions d’équité : « Ça va faire plus mal aux gens des régions, qui parcourent de longues distances, qu’à quelqu’un qui vit à trois kilomètres de son bureau. »

Une subvention pour acheter un véhicule électrique

Les gouvernements aiment faire ce type de cadeaux, mais est-ce sensé ? Michaël Robert-Angers émet plusieurs réserves : la subvention ne profite pas aux gens à faible revenu, car l’auto électrique reste encore inaccessible pour eux… pas plus qu’elle ne profite à l’économie québécoise, puisque la province ne produit pas de véhicules de promenade. Surtout, elle coûte cher : Transition énergétique Québec calcule qu’avec le programme Roulez vert, épargner une tonne d’équivalent CO2 par an coûte 199 $. À titre de comparaison, dans le domaine résidentiel, Chauffez vert atteint le même résultat au coût de 16 $.

Guillaume Hébert reconnaît les bienfaits de cette subvention, qui donne quelques résultats et qui peut, à terme, permettre de développer une industrie locale (pensons à la fabrication de bornes de recharge), mais il apporte un bémol. « Mettre autant d’énergie à amener les gens vers la voiture électrique ne va pas résoudre nos problèmes d’étalement urbain. » Le chercheur de l’IRIS en profite pour ouvrir une autre porte : réformer la fiscalité municipale, afin que les villes ne soient plus aussi dépendantes de la construction résidentielle (et surtout du pavillon nécessitant deux autos par famille), aurait une incidence importante sur les émissions du secteur des transports.

Une aide fiscale aux entreprises qui financent l’abonnement au transport en commun de leurs employés

Luc Godbout qualifie cette idée de « cas flagrant de mesure méconnue ». Car oui, elle existe déjà au Québec depuis 2006 ! C’est avantageux pour les employés qui prennent déjà l’autobus (on leur rembourse leur billet) et motivant pour ceux qui ne le prennent pas encore. Quant à Guillaume Hébert, il aime l’idée de faire ainsi participer les entreprises aux changements de comportement, et pas seulement les individus. Et il appelle à voir plus large en récompensant également celles qui facilitent le télétravail, voire en pénalisant celles qui, au contraire, construisent un stationnement ou l’agrandissent.

Cet article provient d’un cahier spécial « Repenser nos transports », publié par le quotidien Le Devoir, en partenariat avec Unpointcinq.

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