Dossier spécial : (In)justice climatique , partie 5

Albert Lalonde, engagé pour la justice climatique

Albert Lalonde
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Albert Lalonde ©Anaïs Fleury
Created with Lunacy 3 min

Albert Lalonde est l’un des 15 jeunes qui poursuivent le gouvernement canadien pour sa contribution aux changements climatiques. Un engagement en faveur de la justice climatique qui ne date pas d’hier. Portrait.

Le rendez-vous fut donné devant l’Esplanade Tranquille, à Montréal, en ce début de mois de février qui ressemblait encore à l’hiver – la suite fut plutôt printanière. J’y retrouve Albert Lalonde, 22 ans, pour parler de son engagement pour le climat et, en particulier, de sa participation à la poursuite La Rose c. Sa Majesté le Roi, du nom de l’action en justice intentée par 15 jeunes Canadiennes et Canadiens contre le gouvernement du Canada.

Albert m’explique d’emblée que son « engagement est une façon d’exister qui a toujours fait partie de [sa] vie ». Né dans une famille militante et engagée politiquement, il était très sensible aux injustices. En grandissant, cette sensibilité n’a pas disparu. Mieux, Albert l’a transformée en action.

Adolescent, il a fait l’école buissonnière de nombreux vendredis pour militer dans la rue en faveur du climat. Lors de la grande manifestation du 27 septembre 2019, pour laquelle il a travaillé des mois, tout est devenu clair dans sa tête : utiliser les recours légaux pour contraindre le gouvernement à agir et à prendre ses responsabilités.

En 2019, lorsque l’ONG américaine Our Children’s Trust a lancé un appel à l’intention des jeunes Canadiens et Canadiennes qui subissent les effets des changements climatiques, Albert y a répondu, sans trop y réfléchir : « Je me suis manifesté, mais je ne savais pas si les impacts liés aux changements climatiques que je vivais au quotidien, dans mon coin, pouvaient constituer une violation de la Charte canadienne des droits et libertés. J’avais un intérêt pour le droit, cela me semblait en valoir la peine, et en plus ils cherchaient des personnes au Québec, pour avoir une certaine représentativité. »

Une poursuite contre le gouvernement…

Le 25 octobre 2019, une poursuite est intentée contre le gouvernement canadien par 15 jeunes Canadiennes et Canadiens, dont Albert Lalonde. La poursuite repose sur le principe que le gouvernement contribue, par ses actions, aux changements climatiques et compromet l’avenir des jeunes. « Les impacts des changements climatiques que je vis constituent une violation de mes droits constitutionnels à la vie, à la liberté, à la sécurité, et le gouvernement doit en être tenu responsable », affirme Albert, s’appuyant sur l’article 7 de la Charte canadienne qui garantit ces droits.

Après un rejet de la plainte par la Cour fédérale en 2020, les juges de la Cour d’appel fédérale ont finalement considéré, en décembre dernier, que la cause des jeunes devait être entendue par un tribunal.

Dans le fond, les plaignantes et plaignants de sept provinces et d’un territoire souhaitent que les tribunaux ordonnent au gouvernement de mettre en œuvre un plan de rattrapage climatique. Ce dernier permettrait d’aligner les objectifs climatiques du Canada sur les limites planétaires : « Parce que non seulement le Canada n’atteint pas ses cibles de réduction de gaz à effet de serre (GES), mais ces cibles sont insuffisantes si on prend en compte sa responsabilité en tant que pays industrialisé, qui a émis de manière historique une quantité disproportionnée de GES », développe Albert.

Il poursuit : « Un message qui est important, c’est qu’au-delà du recours judiciaire lui-même, on parle trop souvent des changements climatiques au futur. Pourtant, on vit déjà la crise climatique, ici et maintenant. Évidemment, au Canada, on a la chance de ne pas être les plus affectés, mais ça ne veut pas dire que les impacts vécus par les enfants et les jeunes ne sont pas extrêmement préoccupants. »

… au nom de la justice climatique

Parler de justice climatique et environnementale, c’est finalement « comprendre que nous vivons dans un monde qui est très inégal pour différentes raisons et que les changements climatiques, la crise de la biodiversité vont seulement accroître ces injustices. Chaque dixième de degré d’augmentation des températures mondiales que nous pouvons éviter aura un impact sur la vie et la sécurité de millions de personnes », précise Albert.

Le droit à un environnement sain est reconnu au Québec dans la Charte des droits et libertés de la personne. Cependant, il est difficile de s’en servir pour obtenir des décisions favorables, pour tenir les gouvernements responsables, juge Albert.

Le militant observe l’émergence d’un mouvement juridique qui s’attaque aux injustices environnementales au Canada comme au Québec : « Ce sont les communautés autochtones, souvent les communautés racisées, immigrantes et pauvres qui sont les plus affectées par la crise climatique, qui sont davantage exposées aux contaminants toxiques rejetés par les grandes industries. Nous avons donc besoin d’un cadre juridique fort qui puisse tenir le gouvernement responsable. »

Pour Albert, parler d’environnement et de climat, c’est parler de justice sociale. Les luttes pour l’environnement et contre les changements climatiques sont essentielles pour éviter que les personnes les plus vulnérables se retrouvent encore plus menacées.

Documenter les effets des changements climatiques

Ces quatre dernières années, Albert est resté en contact avec les autres jeunes qui font partie du recours, en attendant d’obtenir une audience ou un jugement. Cet « esprit de gang » entre les jeunes au moment de la poursuite en 2019, à Vancouver, Albert le décrit comme « super fort ». Quatre années se sont écoulées. « C’est assez spécial : on a toutes et tous changé, certains avaient 12 ans au moment de la poursuite et sont maintenant des ados. Moi, j’avais 17 ans et maintenant je suis rendu vraiment ailleurs dans ma vie. Donc c’est quelque chose qui nous suit, on se tient ensemble, mais c’est un lien assez difficile à décrire », confie Albert.

Aujourd’hui, dans le cadre de la poursuite, les jeunes plaignants et plaignantes travaillent ensemble à documenter les effets des changements climatiques vécus. Albert constate même que ces effets « s’accroissent et s’intensifient. Depuis quatre ans, on voit déjà une différence; c’est une accélération et c’est préoccupant », confie-t-il.

Le dernier jugement rendu par la Cour d’appel fédérale est donc favorable aux jeunes et valide la recevabilité du recours à condition que certaines modifications soient apportées, explique Albert. Il faut ainsi cibler les mesures prises et les inactions, « parce que la Cour a ouvert la voie à poursuivre le gouvernement sur la base de gestes qu’il n’a pas posés ».

Les prochaines dates sont difficiles à déterminer, potentiellement le début de 2025 pour le procès et son jugement. Pour Albert, le système juridique est « long et imprévisible » et la « loi est imparfaite ». C’est pour cela qu’il souhaite lutter ailleurs et militer dans la rue : « Au début d’une lutte, c’est toujours difficile d’obtenir justice. Les systèmes n’entendent pas forcément les revendications et les arguments. Aussi, les droits des enfants, le droit à la vie, à la liberté, à un environnement sain et le droit des générations futures ne sont pas très bien protégés. Il y a donc du travail à faire sur toutes sortes de fronts », conclut-il.

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