Du bioplastique made in Québec

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© Bosk
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19 novembre 2018 - Guillaume Roy, En quête d'aventure

Du bioplastique compostable pas cher pour réduire notre impact sur le climat? Ce sera bientôt possible grâce à une entreprise québécoise qui vient de développer un nouveau procédé de production du plastique à partir de déchets des usines de pâtes et de papiers.

Chaque fois que j’achète des légumes suremballés ou que je prends un sac en plastique parce que j’ai encore oublié mon sac réutilisable, je me sens coupable, et l’image du continent de plastique dans l’océan me revient immanquablement à l’esprit.

Grâce à l’initiative d’une entreprise de Québec, Bosk Bioproduits, et de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), ma culpabilité pourrait bientôt être chose du passé. Alors que la fabrication de plastique à partir de matières végétales était jusqu’ici coûteuse et peu rentable, le tandem a développé une nouvelle technique pour produire des bioplastiques compostables à moindre coût.

Concrètement, ça veut dire que d’ici quelques mois, des emballages souples pour l’industrie alimentaire, des contenants, des fils de plastique pour imprimante 3D, des matériaux spécialisés pour l’industrie médicale et d’autres produits pourront être fabriqués au Québec avec une source de plastique d’origine naturelle plutôt qu’avec du pétrole.

Comment? En utilisant les résidus des usines de pâtes et papiers comme source de carbone, ce qui permettra de réduire le coût de production tout en valorisant les déchets. « Rien qu’en utilisant les boues des papetières du Québec, on pourrait produire 100 000 tonnes de bioplastique par année », estime Paul Boudreault, président-directeur général de Bosk Bioproduits.

En s’installant à proximité d’usines de pâtes et papiers, l’entreprise pourrait aussi profiter d’une source d’énergie à faible coût, car ces installations produisent de très grandes quantités de vapeur et de chaleur qui pourraient alimenter le procédé industriel, affirme l’entrepreneur. Résultat : Bosk Bioproduits pourra créer un bioplastique dont le prix ne sera que de 1,5 à 2 fois supérieur à celui du plastique traditionnel [à base de pétrole], ce qui, selon Paul Boudreault, représente un coût bien moins élevé que ce qu’on retrouve actuellement sur le marché.

Selon Bosk Bioproduits, il y aurait cinq usines de pâtes et papiers au Québec (ici celle de Produits forestiers Résolu à Dolbeau) qui ont un potentiel de production d’environ 100 000 tonnes de bioplastique compostable à partir des résidus papetiers. © Guillaume Roy

Habituellement, « le terme bioplastique veut juste dire que c’est fait avec des produits d’origine naturelle, comme de l’huile végétale », précise le président. « Ce n’est peut-être pas fait avec des produits pétroliers, mais si c’est pour produire le même type de plastique conventionnel, qui prend des centaines d’années à se dégrader, on n’a pas réglé le problème. Chez Bosk, nous produisons du plastique compostable en 45 jours et moins. »

Double gain pour le climat

En utilisant des déchets d’usine qui auraient généré du méthane lors de leur enfouissement, ce nouveau procédé permet de faire un double gain en matière de réduction des gaz à effet de serre (GES), ajoute Rajeshwar Dayal Tyagi, spécialiste en bioconversion des résidus au Centre Eau Terre Environnement de l’INRS. « On remplace le plastique fait avec des produits pétroliers et on utilise des résidus d’usine qui auraient dégagé des GES en se décomposant », soutient le chercheur, qui travaille actuellement à quantifier les réductions d’émissions ainsi obtenues.

 

Non merci!

Grâce à ses aspects pratiques (souplesse, résistance, légèreté, imperméabilité), le plastique a connu une popularité croissante depuis 50 ans. En 2017, on a produit plus d’un trillion de sacs de plastique dans le monde. Comme leur décomposition émet très peu de GES, c’est surtout lors de leur fabrication que les emballages – qui représentent 40 % de la production de plastique – contribuent aux changements climatiques, quel que soit le matériau d’origine utilisé (pétrole, huile végétale, amidon, résidus de pâtes et papiers, etc.). Même si le bioplastique génère moins de GES lors de sa fabrication que les plastiques à base de pétrole, le meilleur sac de plastique reste celui que l’on n’utilise pas…

Avant de produire à très grande échelle, Bosk Bioproduits compte s’entendre avec une papetière pour implanter une première usine pilote au cours des prochains mois. Un projet de 14 millions de dollars – dont 10 millions proviennent de financements publics – qui créerait une dizaine d’emplois, indique le PDG, qui souhaite produire du bioplastique québécois dès l’an prochain. « On discute avec [la papetière] Produits forestiers Résolu et d’autres pour parapher une entente d’ici la fin de l’année. »

Du bioplastique dans les bactéries

La recherche ayant mené au développement de ce nouveau procédé de fabrication moins coûteux a été amorcée il y a sept ans. « Le bioplastique est produit par des bactéries qui se nourrissent de carbone », explique Rajeshwar Dayal Tyagi. Normalement, avec ce type de procédé, les entreprises utilisent du glucose, provenant du maïs, ou des déchets contenant peu de carbone. Mais ces sources de carbone sont trop chères pour produire du bioplastique bon marché, ajoute-t-il.

Paul Boudreault et Rajeshwar Dayal Tyagi (à l'arrière plan) dans le laboratoire de Bosk Bioproduits. © Bosk

Le chercheur s’est donc tourné vers les papetières qui produisent des boues, des déchets à forte teneur en carbone. « Bien souvent, les usines doivent payer pour les enfouir ou pour les traiter », souligne M. Tyagi. Au lieu de les jeter, le chercheur les redirige vers un fermenteur où des bactéries consomment le carbone pour produire du bioplastique.

Des marchés à développer

Si plusieurs clients sont intéressés par ces bioplastiques compostables, dont des entreprises cosmétiques qui souhaitent offrir des contenants d’emballage écoresponsables à leurs clients, il reste encore du travail à faire. « Les manufacturiers ne sont pas habitués à travailler avec ces produits-là, admet Paul Boudreault, car les molécules de bioplastique sont différentes de celles utilisées pour faire du plastique à base de pétrole. »

Avec le Conseil national de recherche du Canada, Bosk Bioproduits travaille donc à la mise au point de produits prêts à l’emploi pour l’industrie. Les travaux effectués jusqu’à maintenant laissent croire qu’il sera possible de développer des mélanges pour tout type d’application. « On a déjà une dizaine de projets avec de gros joueurs québécois », confie-t-il, ajoutant que des tests concluants ont permis de produire du plastique pour l’impression 3D et des ustensiles jetables.

Le potentiel de croissance est certes énorme, mais Paul Boudreault croit que le bioplastique demeurera, à court terme, un marché de niche, car il est impossible de le produire au même coût que le plastique conventionnel. Il n’en demeure pas moins convaincu que ce plastique naturel pourrait devenir un nouveau Klondike lorsque les quantités produites seront suffisantes pour répondre aux besoins des grosses pointures de l’industrie.