Des jardins urbains aux impacts divers

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Fermes urbaines sur les toits de Gestion de Placements Manuvie, dans le Vieux-Montréal ©Microhabitat
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L’agriculture urbaine connaît un engouement croissant au Québec. Loisir pour citadins ou réelle action de lutte et d’adaptation aux changements climatiques?

Autoproclamée « berceau du développement durable », Victoriaville a pleinement embrassé l’agriculture urbaine dès 2015 en inaugurant le Jardin des rendez-vous. Dans cet espace de 4000  m2, les citoyens peuvent cueillir gratuitement des légumes dans des bacs de culture entretenus par des bénévoles et acquérir des connaissances dans le domaine du maraîchage. Un franc succès selon le maire André Bellavance : « J’avais peur qu’on soit victimes de vandalisme, mais les gens sont très respectueux! »

Aujourd’hui, tout néophyte peut se lancer dans l’agriculture urbaine en consultant la page qui y est consacrée sur le site Web de « Victo » : on y trouve toutes les ressources nécessaires, qu’il s’agisse de guides pratiques, des règlements municipaux ou des organismes à qui donner ses surplus. Bientôt, la Ville offrira un service de prêt d’outils, invitera des conférenciers et autorisera peut-être les ruches sur les terrains privés.

Mais les citoyens qui musclent leur pouce vert ont-ils la sensation de lutter contre les changements climatiques ou du moins de s’y adapter? Pas sûr. Le maire fait remarquer qu’ils jardinent avant tout parce qu’« ils aiment ça » et voient cette activité comme une saine habitude de vie, au même titre que manger santé ou faire du vélo. « Comme les pistes cyclables, l’agriculture urbaine fait partie des actions qu’on veut mettre en place pour que les gens puissent s’épanouir, ajoute-t-il. C’est aussi quelque chose qui est accessible à tout le monde, et pas uniquement aux plus fortunés. »

Les entreprises y trouvent leur compte

Cofondateur de Microhabitat, une compagnie d’une quinzaine d’employés qui aménage et entretient des potagers pour des entreprises à Montréal et à Toronto, Alexandre Ferrari-Roy note lui aussi que le côté agréable et mobilisateur de l’agriculture urbaine est ce qui la rend attractive.

« Les entreprises l’utilisent pour améliorer l’environnement de travail, de la même façon qu’elles pourraient installer un gymnase ou une piscine », explique celui qui a conçu des jardins pour le Centre Eaton, Manuvie ou la brasserie McAuslan. Autre avantage : l’agriculture urbaine leur permet de soigner leur image de marque, en faisant don des récoltes à des banques alimentaires.

Les gains sur le plan climatique sont cependant bien réels, poursuit Alexandre Ferrari-Roy : « La plupart des immeubles dans lesquels on travaille sont certifiés BOMA BEST », un programme qui vise l’excellence en performance énergétique et en gestion environnementale dans l’immobilier commercial. Les jardins urbains, en plus de séquestrer du carbone, participent à la rétention des eaux pluviales et à la limitation des îlots de chaleur.

Les entreprises utilisent l’agriculture urbaine pour améliorer l’environnement de travail, de la même façon qu’elles pourraient installer un gymnase ou une piscine.

Alexandre Ferrari-Roy, co-fondateur de Microhabitat

De plus, l’agriculture urbaine commerciale permet de diminuer le transport entre producteurs et consommateurs. Il est difficile de chiffrer les émissions de gaz à effet de serre ainsi évitées, mais les villes québécoises se démarquent dans ce domaine : avec 45 entreprises agricoles en 2020, Montréal surclasse Toronto, qui n’en a que 18, alors que Québec en compte 16, d’après le Carrefour de recherche, d’expertise et de transfert en agriculture urbaine (CRETAU).

Quant au développement de la culture en serre dont on parle tant depuis le début de la pandémie, il est aussi pertinent en ville : en plaçant une serre sur le toit d’un immeuble, les besoins en chauffage diminuent de 6 à 12 % pour la serre, et de 1 à 13 % pour le bâtiment, d’après les résultats préliminaires d’une recherche menée par le Laboratoire sur l’agriculture urbaine.

Pour des villes vraiment nourricières

Raphaël Arsenault, un citoyen de Rimouski ©Rémy Bourdillon

« Une chose qui est très bien avec l’agriculture urbaine, c’est que ce n’est pas un sujet politique où il y a des affrontements : elle fait consensus », dit Raphaël Arsenault, un citoyen de Rimouski impliqué dans le mouvement international des Incroyables comestibles, qui crée des espaces cultivés dans les villes. Les élus ne perdent donc pas de votes en la soutenant…

Comme un nombre croissant de personnes, Raphaël Arsenault défend toutefois une vision plus ambitieuse : la vraie force de l’agriculture urbaine, d’après lui, réside dans sa capacité à sortir le citoyen de sa condition de consommateur aux pouvoirs limités, pour le placer au centre d’une communauté résiliente. Il nous reçoit d’ailleurs dans un potager communautaire créé pour renforcer le tissu social d’un quartier rimouskois par une assemblée de citoyens – l’idée étant que lorsqu’on jardine ensemble, on en vient à se connaître et à former un groupe engagé.

Une chose qui est très bien avec l’agriculture urbaine, c’est que ce n’est pas un sujet politique où il y a des affrontements : elle fait consensus. 

Raphaël Arsenault, citoyen de Rimouski impliqué dans le mouvement international des Incroyables comestibles

La prochaine étape, selon lui? Dépasser « l’agriculture urbaine de paraître » et accroître la production. « Il faut que la souveraineté alimentaire devienne un rôle du citoyen », lance-t-il. Il croit que les villes peuvent franchir ce pas en se fixant des objectifs ambitieux de production, en mobilisant les forces vives qui travaillent souvent en vase clos, et en considérant l’agriculture urbaine comme une solution de rechange crédible au supermarché.

L’enjeu est de taille : selon la Fondation David Suzuki, les changements climatiques devraient entraîner une raréfaction des terrains agricoles, notamment à cause des sécheresses, ce qui pourrait accroître le phénomène d’accaparement des terres. À terme, même la souveraineté alimentaire du Québec serait menacée. L’heure est sans doute venue de prendre l’agriculture urbaine au sérieux.

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