Une mouvance est en train de se créer, au petit trot, dans nos campagnes, quelques maraîchers remettant le recours à nos amis à quatre pattes au goût du jour, en lieu et place des machines polluantes.
De là à retrouver bouses et crottins sur nos routes, il n’y a qu’un pas. Car nous sommes nombreux à nous questionner sur cette ère de grande vitesse, du tout pétrole et de ses conséquences planétaires, telles que la hausse prévisible des déplacements de populations en raison de la submersion des terres – due à l’élévation des océans – ou du difficile accès aux ressources. Heureusement, certains semblent vouloir ralentir un tant soit peu la cadence et, du même coup, leur impact sur le climat.
Remiser le tracteur et atteler les animaux de trait n’est donc pas une idée folle, pour peu que l’odeur du crottin ne vous incommode pas trop. Projetez-vous en 1850, loin des émanations d’hydrocarbures dues aux transports de masse. En ce temps-là, le moyen le plus rapide de se déplacer reposait sur la force des chevaux ou des bœufs.
L’animal, nourri par le foin ou l’avoine qui poussait aux alentours, trottinait alors partout, tirant charrette, carriole, herse, traîneau, berline, chariot, voiture, calèche et même chasse-neige, omnibus, tramway et pompe à incendie! Et, avec lui, les inévitables bouses ou pommes de route : de l’engrais tout trouvé pour les maraîchers.
Certes, le cheval était infiniment moins rapide que nos véhicules à essence, mais il était alors ce qu’il y avait de plus fiable : ici, un omnibus hippomobile, apparu en juin 1841 à Montréal, menait chaque heure du jour ses 6 à 16 passagers au traversier de Longueuil ou au service des sleighs lorsque le fleuve était gelé; là, une voiture publique tirée par un cheval, ancêtre du taxi, que l’on voyait encore dans certains villages dans les années 1940; quant au tramway à chevaux, premier transport en commun à Montréal (100 000 habitants), il a obtenu un succès foudroyant dès la première année, en 1861, avec un million de voyages, et huit millions en 1888 (182 695 habitants en 1891)!
Il faut souligner qu’à cette époque, le rapport au temps était bien évidemment très différent. Jusqu’au tournant du siècle, le Québec ne comptait aucune route carrossable. Le voyage en diligence entre Trois-Rivières et Québec ne s’effectuait pas en moins de sept heures, pour le prix de 20 sous par lieue parcourue. Pire, il fallait 10 jours pour couvrir le trajet de Québec à Gaspé. Et il fallait emprunter une voiture tirée par un cheval, un bac pour traverser les cours d’eau et même une goélette!
Les nouvelles technologies finissent par changer le rapport au temps. Entre le train qui achemine des marchandises du canal de Lachine au centre-ville de Montréal en 20 minutes contre deux heures pour la charrette-cheval, l’entrepreneur préfère naturellement la machine. Le rythme s’intensifie plus encore avec l’arrivée, en 1892, du fameux Rocket, premier tramway électrique. Enfin, l’introduction des véhicules à essence au 20e siècle sonne le retour définitif des animaux dans les prés. Ces véhicules modernes révolutionnent nos modes de vie et nos paysages en même temps qu’ils génèrent leurs effets indésirables sur la qualité de l’air, de l’eau et des terres de notre planète, allant jusqu’à bouleverser notre climat.